Ton bébé a sucé son pouce et tu t’es vite empressée de remplacer cette habitude par celle de prendre la suce. Tu t’es dis « une suce ça se coupe, mais pas un pouce mettons! » et tu avais raison.
Bébé a développé une véritable addiction à ce petit objet en apparence si inoffensif. Il a aussi sa ou ses suces préférées « Non maman, veux la suce bleue pas orange ». Des fois tu tombes aussi sur un modèle de poupon qui a besoin de plusieurs exemplaires pour dormir heureux – genre une dans chaque main et une dans la bouche. Tu te gardes une montagne de suces de spare dans une armoire de ta cuisine au cas où bébé en perdrait une, pis l’oublier à la maison quand tu pars pour la soirée chez des amis équivaut à signer ton arrêt de mort.
Quand bébé grandit, tu commences à sevrer doucement l’usage de la sacro-sainte-suce et tu réussis quand même pas pire considérant que désormais bébé prend la suce uniquement dans la voiture et pour le dodo – plus quelques occasions spéciales. Il t’arrive à quelques reprises de retrouver le bébé debout sur ton comptoir de cuisine, les armoires ouvertes et la suce dans la bouche, mais tu gères ça avec zénitude et maintenant ça va.
Après quelques mois de plus, tu coupes aussi son usage dans l’auto excepté pour les très longs trajets et les occasions spéciales ont commencé à se faire de plus en plus rares. Bébé tente quelques fois de bypasser tes nouvelles règles, mais dans l’ensemble tout se déroule bien.
Puis, un matin tu réalises que ton bébé n’est plus un bébé. Il a trois ans maintenant et tu essuies régulièrement des commentaires du type « QUOI!? Il a encore une suce!?? Coupe ça au plus sacrant, ça va lui gâcher les dents, lui causer des caries, l’empêcher de développer son langage… »
Mais toi, tu le sais que ton enfant a une bonne dentition et que son langage est même un peu trop développé – il arrête juste jamais de parler c’t’enfant! Tu vois pas trop où est l’urgence. Ton mini n’a ni toutou ni doudou pour le réconforter lorsqu’il est seul dans son petit lit le soir à la lueur de sa veilleuse. Pourquoi lui enlever sa suce alors? Pour répondre à quel critère de la société??
Un soir, tu flanches sous la pression et décides que ça y est pis tu coupes tous les bouts de suces sur un coup de tête. Quand le dernier coup de ciseaux est donné, déjà tu réalises que tu viens de faire une énorme erreur. C’est donc en tremblant de la tête aux pieds que tu affrontes le mini à l’heure du coucher pour lui expliquer que les suces, c’est fini. Tu passes alors des heures d’enfer à devoir aller réconforter le bambin en pleurs dans son petit lit et tu pleures toi aussi. Mais à quoi t’as pensé de faire ça? T’aurais plutôt dû faire participer ton enfant au rituel. Lui inventer une jolie histoire de lapin des bois, de bébé oiseau tombé de son nid ou de fée-des-suces. Quelque chose de joli qui le réconforterait.
Alors dès l’ouverture des magasins le lendemain matin, te voilà tu pas en train de chercher la fameuse suce bleue dans l’allée de la pharmacie – cernes de trois kilomètres de long sous les yeux dus à ton horrible nuit – en te disant qu’on ne t’y reprendra pas. Mais tu te jures que c’est la dernière que tu lui achèteras ou pas. Tu ne la laves plus (sauf quelques fois où tu la passes vite fait sous le jet d’eau) et tu la laisses dépérir en souhaitant que ton petit s’en lassera de lui-même. Pis quand tu verras cette ère arriver au loin, alors là tu feras le nécessaire.
En attendant, ton accro aux suces a droit à un petit répit… qu’il en profite!
AMY BUREAU |
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