Je travaille avec « la belle jeunesse » comme dirait ma grand-mère. Je travaille avec une bande de petits monstres comme dirait mon voisin. Je travaille avec des enfants selon mon patron. Je travaille avec des petits poqués me dirait la DPJ. Je travaille avec des petites boules d’émotions, que je te dirais.
Je suis enseignante.
Mon travail, je l’aime, je l’adore, je le fais par passion et non pour l’argent ou la reconnaissance qu’il m’apporte. J’aime croire que je peux faire une différence dans la vie. J’aime rêver que j’allume une petite flamme en eux. Mais pourtant, parfois, trop souvent, je me sens impuissante.
Je suis une enseignante et ce soir, j’ai pleuré en revenant du travail.
Théoriquement, mon travail consiste à transmettre des connaissances et des méthodes de raisonnement. Dans la pratique, je tente d’apprendre une multitude de choses à des êtres humains, qui traînent avec eux leurs histoires, leurs émotions, leurs écorchures.
Ceci étant, depuis le début de l’année scolaire j’essaie de faire comprendre à Léo que lorsque qu’il écrit, il doit accorder le verbe avec son sujet, parce que le sujet c’est le boss de la phrase. Mais Léo chez lui, le boss c’est son père et son père, s’il ne l’écoute pas, ce n’est pas que son erreur qui sera soulignée en rouge; ce sera la tempête rouge, violente, c’est épeurant. Alors les leçons de grammaire, les terminaisons en «s» ou «ent», Léo s’en fiche tant que son père n’est pas contrarié.
Il y a aussi Léa pour qui les multiplications, ça ne rentre juste pas. Léa sait compter, mais elle ne veut pas aller plus loin parce que son cerveau est resté coincé à compter le nombre de fois où sa mère est partie à l’hôpital en psychose et celles où elle est rentrée à la maison en craignant de trouver sa mère en overdose. Alors pour Léa, les mathématiques, la multiplication dans l’équation des paniers de pommes, c’est loin d’être une priorité.
Il y a aussi Justin qui n’en a rien à foutre quand je lui raconte les grandes explorations et l’arrivée des premiers colons parce que pendant mon cours, il se demande s’il aura de quoi souper ce soir, s’il sera seul jusqu’à trois heures du matin et si sa belle-mère va encore demander à son père de choisir entre elle et lui.
Il y a aussi Élisabeth, inscrite depuis le début de l’année scolaire, mais que j’ai vue une dizaine de fois tout au plus. Aînée d’une trâlée d’enfants de pères et de mères différents, elle est la gardienne de suppléance pour les enfants malades; à la gang, c’est une job temps plein.
Il y a aussi Laurie et Laurent, écorchés vifs, qui sont en attente d’une famille d’accueil et tout le reste de ma classe qui veut apprendre, témoins et acteurs vivant au rythme des crises et des joies.
Je suis une enseignante et ce soir, j’ai pleuré dans ma voiture.
Ce soir, je me suis effondrée d’impuissance.
Ce soir, je me suis demandé si je pouvais vraiment faire la différence.
Ce soir, j’ai failli tout lâcher.
Puis, ce soir, en ouvrant mon sac, j’ai trouvé un petit mot écrit de la main maladroite de Léa qui disait « Merci de croire en moi madame » et j’ai compris pourquoi je faisais ce métier de fou.
Oh m’y god que ça doit tellement être ça ? Bravo à vous chère enseignante d’avoir tout compris la détresse de ses tout petits ? Bon courage ?
Je connais de A a Z ce qu’est une enseignante puisque j’avais 6 soeurs, toutes enseignantes et directrices d’écoles. Il m’en reste deux 89 et 92 ans et j’ai comme l’impression qu’elles enseignent encore car il est agréable d’entendre raconter qu’elles rencontrent leurs anciens, iennes, éleves, et elles apprennent que c’est grace a elles si elles sont éduquées avec des familles impressionnantes de part leurs professions. Je ne veux surtout pas oublier le professeur ( enseignant ) qui m’a mis sur le chemin le plus chaleureux ou j’ai retrouvé le bonheur de vivre et j’oserais avouer que que si j’ai gradué, c’a été grace premierement a mes deux parents, et a mes six institutrices. Bien entendu, étant seul de garcon avec six diplomées, j’ai certainemnt été choyé. et c’est ce que je souhaite a tous (es) celles qui recherchent une éducation générale afin de pouvoir pleurer de joies !!
C’est vrai que tu as la passion d’enseigner et de croire en eux!
Merci pour le texte!
❤️?
Ouff, les larmes me montent aux yeux , en lisant ce texte, j’ai cru me reconnaître à certains passages! ?? Comme je les comprends ces enfants …..ils en ont trop à gérer ! Par chance que de nos jours, les enseignants(es) comprennent ces pauvres petits et réussissent à les faire réagir!
Je suis enseignante en adaptation scolaire depuis 18 ans. Mes classes ressemblent beaucoup à la tienne. Je comprends tellement ….. c’est ce genre de message qui nous redonne espoir et qui nous prouve qu’on peut faire une différence sans s’en rendre compte.
Merci d’être en enseignante attentive à ses élèves.
Touchant témoignage et très réaliste.
Votre texte m’émeu aux larmes. Nous ne pratiquons pas la même profession mais nous oeuvrons auprès des mêmes enfants. J’en ai passé des fins de journée à pleurer dans ma voiture dans mon bureau… Ce qui me fait le plus mal c’est qu’après 32 ans, ça ne change pas. Une chance qu’il y a les sourires de temps en temps, les petites réussites et ces merveilleux yeux pleins d’espoir… Je vous souhaite une belle continuité et merci pour eux !
Wow ? et c’est tellement ça, mon amoureuse est orthopédagogue et c’est son quotidien à elle aussi et c’est de pire en pire, elles-mêmes est plus souvent qu’autrement à bout de souffle y a un grave problème de société évidente et dans 85% du temps le problème vient de la maison????????
Et ce soir, j’ai pleuré en lisant votre histoire. Devant tant de misère que la vie a à raconter. Parce que des professeurs comme vous peuvent faire la différence et des années plus on se souvient de Madame Taffany qui m’a prise sous son aile parce j’avais été détruite par sa prédétrice maltraitante ( sans pour autant calculer l’énergie que ça lui a certainement demandé). Parce qu’aujourd’hui sans elle et les suivants qui ont compté, qui m’ont fait rire, chanté et redonné le goût d’aller à l’école le coeur léger, je ne serais jamais devenue sage femme. Savoir déjà quelles sont les difficultés de vos élèves au quotidien montre qu’elle professeur vous devez être pour eux, quelle importance et quelle différence vous faites pour eux chaque jours. Les difficultés de votre métier sont insoupçonnable mais merci d’être là et de donner tellement chaque jours même si vous n’y êtes pas obligé. Vous êtes un bijou pour ces enfants.
Bravo à vous. Ça ne doit pas être facile tous les jours. Ces enfants qui n’ont rien demandé et qui, malgré eux, portent déjà le poids des responsabilités qui ne doivent pas être les leur. ?
Merci. Je ne pleure pas peut être parce que mes elèves sont plus jeunes et que j’ose espérer encore que les aides psy, psychomot, orthophoniste, … peuvent les aider à devenir elève mais je suis plutôt en colère contre le droit des parents, la priorite au maintien au domicile alors que l’accompagnement des mères ou parents » maltraitant » psychologiquement se fait peu faute de moyens! Quand je vois que nous parlons plus de handicap social que de handicap physique ou mental, je rage. Des enfants sont sacrifiés! Protection de l’enefance???? non assistance des parents plus souvent.
Il y aSamael dont la psy m’a dit qu’elle avait dit aux parents séparés qui se battent à distance à travers leur fils par garde alternée qu’ils allaient rendre fou leur enfant!
Il y a Abygaël que sa mère a fait placer mais qui a gardé sa petite soeur, qu’elle voit tous les jours à l’ecole et dont la mère ne laisse pas Abygael être en confiance, s’attacher à sa famille si apaisante. Etc…
J’adore inventer, prevoir des activités pour qu’ils apprenent en jouant, en prenant du palsir mais le quotidien parasité par leur mal être est dur dans un groupe de 30 voir 32 enfants de 5, 6 ans dans un espace classe non extensible, entouré d’une cour goudronnée … C’est tout cela qui me fait compter les années vers la retraite.
Tu ne peux pas sauver le monde parfois je me sens impuissante face à certaines situations auxquelles je ne peux rien changer pourtant c’est la vie elle continue et il faut vivre avec tout ce poids courage ma cousine profite de tes vacances pour te ressourcer je t’embrasse
On pourrait penser que c’est exagéré, mais non, c’est notre quotidien et c’est parfois tellement dur. Même si c’est difficile parfois d’y croire, il y a des moments, peut-être minoritaires en proportion, où l’on peut faire une différence, même si on ne le saura peut-être jamais.
Je me retrouve dans ce post. Merci pour cette publication.
Merci pour votre sensibilité, grande écoute et dévouement . Nombreuses sont les belles qualités dont vous les professeurs démontrés jours après jours auprès de cette si jeune et écorchée jeunesse. J’espère que vous serez entendue par notre gouvernement si soucieux de l’amélioration de l’éducation dès le primaire. J’espère que vous conserverai le goût d’enseigner et que nos dirigeants réaliseront que la réussite passe par vous et les professionnels de soutien. Et, que vos salaires seront augmenter en conséquences. Ça pourrrait aider à garder le cap en cette periode de turbulence pour votre profession. Bon courage.
Bravo à ces enfants qui s’accrochent et bravo à vous qui leur donnez une branche à laquelle se raccrocher !
Courage, ma petite fille. C est la Notre profession. Comprendre nos eleves et les aider. Tu dois rester forte malgre tout. Courage! Papy
iL FAUT REEDUQUER LES PARENTS, LES RESPONSABILISER.
POUR CELA, CE SERAIT OBLIGATOIRE POUR EUX D’ASSISTER A CETTE « MISE A JOUR ».
TOUT COMME UN PERMIS DE CONDUIRE EST OBLIGATOIRE POUR ROULER, CE SERAIT UN PERMIS D’EDUQUER DES ENFANTS, S’ILS VEUVENT LES GARDER CHEZ EUX; SINON, ILS SERAIENT PLACES ENTRE LES MAINS DE PERSONNES COMPETENTES.
COMMENT EN SOMMES-NOUS LA ?
Ce soir c’est les vacances et je me demande si lundi prochain tous mes petits élèves seront bien là. Si certains auront eu suffisamment à manger pendant les 15 jours sans école, si d’autres auront eu l’occasion de prendre l’air plutôt que de se retrouver coller à des écrans nounous, que la plupart auront pu profiter un peu de la présence agréable de leurs parents sans drames, cris, coups et autres méchancetés !!!! Bref je suis une enseignante en vacances et je me demande si lundi prochain je vais arriver à gérer les tristesses, les difficultés, les peurs, les pleurs, les déceptions, la violence, la fatigue, le stress de mes petits élèves sans m’effondrer devant eux. Je suis terriblement fatiguée de tout ça et je me sens de plus en plus impuissante face à leurs difficultés. Je suis une enseignante et j’ai mal à mon métier !!!!
Merci à ces enseignants-là de faire leur métier avec engagement car l‘apprentissage passe par la relation. Et oui, nos, leurs enfants, les ados, les adultes sont des êtres humains pas des ordinateurs ?
Comme cette histoire est vraie. Des Léo, Léa, j’en ai rencontré. En plus d’être enseignante, j’assume le rôle de parent puisque mon petit Léo ne fait jamais ses devoirs. Il ne fait jamais sa lecture de 10 minutes le soir. Alors, le matin, pendant que mes élèves font le travail du matin, le petit Léo est à mon pupitre à faire sa lecture. Je l’écoute pendant que je vérifie le devoir des élèves. Par la suite, Léo fait son devoir de transcription de sa dictée, à côté de moi. De cette façon, Léo aura la chance de gagner son ruban du mois pour la lecture et aura une meilleure dictée le vendredi. Je dois également surligner tous les sons dans les textes de Léa qui a un programme de français modifié dans ma classe. De cette façon elle peut lire un peu plus, de façon saccadé mais au moins elle décode mieux avec les sons surligner. Je dois souvent le faire à la maison car je n’ai pas le temps de modifier tous les textes à l’école. Ces histoires sont réelles. J’ai 17 élèves dans ma salle de classe et j’ai 6 élèves avec des besoins différents. 3 d’entre eux ont des comportements violents. Je ne peux les asseoir ensembles puisque la chicane pogne et ça fini en scène de violence. Je tente également de faire une différence avec ce groupe. Je tente de maintenir motivé les autres élèves qui veulent apprendre. J’arrive à la maison épuisée. Je dors souvent lorsque je suis assise pour quelques minutes. J’en suis à 4 années de ma retraite et je ne sais pas si j’irai jusqu’au bout. Quand j’y songe, je me dis et si je réussissais avec cette stratégies ou cette motivation……Parfois je me demande si j’aime me torturer mais quand je réussi avec un élève, quel sentiment glorieux !Marcher dans les souliers d’une enseignante, c’est tout un défi !.
Je respecte et j’aime tous ces enseignants et enseignantes qui font ce beau métier de la façon que vous le faites et ils sont nombreux. Très peu le font pour le salaire qui est dérisoire quand on le soupèse à la réalité. Bravo à vous tous.
Comme je te comprends. Enseignante à la retraite depuis deux ans, je viens de lire ta publication et ce matin, j’ai pleuré. J’ai pleuré parce que les souvenirs de tous ces petits mousses blessés par la vie me sont revenus comme un tsunami. Depuis la retraite, j’ai eu l’occasion de repenser à des centaines d’événements arrivés au cours de ma carrière. Et chaque fois, je suis encore toute chamboulée et j’ai les larmes aux yeux. J’ai l’impression d’avoir un choc post-traumatique. Mais les témoignages de dizaines d’enfants lors de ma retraite m’ont démontré que j’ai fait une différence pour plusieurs d’entre eux. Alors, ne lâche pas, ils ont besoin de toi.
Je lève mon chapeau à tout les profs qui relèvent le défi de l’enseignement et font un travail extraordinaire pour éduquer la jeunesse.Ce n’est surement pas toujours évident d’enseigner à ces jeunes qui ont de multiples problèmes familiaux et vivent quotidiennement dans la détresse
. Chapeau !
MA CHÈRE SYLVIE
Ma chère Sylvie,
J’ai lu « ta détresse » avec bcp d’attention. Je connais quand même un peu la génération actuelle qui fréquente l’école et franchement je constate la patience et le courage que doivent développer les enseignants. J’ai un neveu et une nièce qui sont dans l’enseignement. Éric, lui, préfère « la première année » : son but: « Essayer de bien partir ces jeunes » avant qu’ils ne soient « infectés » soit par les plus vieux… soit même par leurs parents (p.c.q. ces derniers sont parfois loin de s’occuper de la bonne éducation de leurs enfants.
Toute l’énergie que tu dépense pour « tes enfants » est loin d’être inutile. Si ça ne se voit pas aujourd’hui… se verra demain!! Bon courage dans ta belle vocation d’enseignante..
Faible comme enseignante, elle devrait se preoccuper de donner son cours, pas de la vie des autres. En se pré-occupant des autres, elle laisse tomber tout ceux qui sont la pour réussir et c’est eux qui risquent de décrocher car ils s’ennuient pendant que les autres tentent de ratrapper le groupe.
Bonjour monsieur, êtes-vous enseignant? J’enseigne en formation professionnelle, donc à des adultes et je vous confirme que ce n’est pas toujours rose. Les jeunes du primaire et du secondaire seront notre clientèle et croyez-moi, ce ne sont pas tous les jeunes qui ont la chance d’être dans la ouate. Difficile pour un enseignant de ne pas se préoccuper de la vie de TOUS les élèves de la classe. Les élèves vivent tous des petits ou des grands problèmes à des niveaux différents. Ils se confient à nous, les enseignants, car il y a de moins en moins de ressources disponibles en milieu scolaire à cause des coupures. Vous dites que nous devons nous concentrer sur notre tâche enseignante, mais de prendre soins de nos élèves c’est aussi ça notre tâche et je ne crois pas que cela brime la qualité de notre enseignement. Que les élèves aillent bien ou non. Les meilleurs enseignants sont ceux qui garde leur côté « humain » et qui arrivent à développer un lien de confiance avec les élèves. Pour enseigner, il faut aimer. Bien des enseignants font la différence, car certains jeunes n’ont jamais eu le support nécessaire de la part de leurs parents. Facile de juger quand on ne travaille pas en milieu scolaire.
C’est tellement triste de voir comment c’est difficile l’enseignement de nos jours. Je lève mon chapeau à tous les enseignants et enseignantes pour leur courage, leur passion et leur détermination de faire la différence dans la vie de ces jeunes qui ont tellement de raisons d’être déboussolés; pas tous ont cette passion malheureusement car bien des profs ne sont pas dans la bonne carrière. Chère p’tite mère, toi tu sembles être dans la bonne carrière car ton message en dit long mais il ne faudrait pas que tu laisses ton cœur se briser a cause des petits qui viennent à l’école avec les problèmes de leur famille, il y a des professionnels pour ces enfants là et ils devraient être suivis par des professionnels afin qu’ils doivent plus présents en classe. L’education d’un enfant commence à la maison et c’est là qu’il y a un gros manque. Tellement de familles sont décomposées de nos jours et plusieurs parents se séparent croyant que c’est la meilleure chose à faire pour leurs enfants; parfois en réalité, plusieurs le font pour eux mêmes et les petits sont les victimes de ces séparations. Continue ton beau travail chère p’tite mère mais essaie de ne pas apporter ton travail à la maison, ie, les problèmes de la classe et dit toi que demain tu recommenceras à donner ce que tu peux à tes écoliers. Je te souhaite que tu trouves le parfait équilibre entre ton travail et ton temps à toi rendue à la maison. ?=> ❤️
J’ai été enseignant pendant 33 ans et j’ai aimé chacun de mes élèves…mais j’admire les enseignants d’aujourd’hui qui sont tellement courageux. Mais j’aurais le goût de dire ciboire reveillez-vous car c’est primordial dans l’avenir comme ça l’a toujours été. On en est tous conscients, mais on veut tous notre petit confort individuel …. on va peut-être se réveiller trop tard… Courage !!!
Bonjour , j’ai lu avec beaucoup d’attention votre témoignage qui m’a beaucoup touchée. C’est tout à votre honneur de vous investir ainsi auprès de ces enfants dont le quotidien n’est pas toujours rose. Vous prenez à coeur votre mission d’enseignante et vous n’oubliez pas le facteur humain de votre profession. Je ne suis pas enseignante moi-même mais je travaille depuis 15 ans dans l’animation. Au cours de ma carrière professionnelle, j’ai pu travailler jusquà présent auprès d’élèves aux profils très différents. Je dirais que le parcours d’une dizaine d’entre eux m’a marquée, et même si je sais que je ne peux pas changer leur quotidien, en revanche je prends conscience que les personnels scolaires et périscolaires qui oeuvrent auprès d’enfants ont un rôle essentiel à jouer auprès d’eux. On peut aider sans s’en rendre compte de nombreux enfants dont la vie est un parcours du combattant , à croire en eux-mêmes, à gagner en confiance , à surmonter des blessures affectives profondes, et à réussir dans leur vie.
Et quelquefois, au détour d’une rue, on croise ce jeune qui nous salue , nous raconte son parcours, et nous témoigne sa reconnaissance par le simple fait qu’il nous reconnaisse et prenne le temps de nous saluer ou discuter avec nous.
Hier , dernier jour de l’année scolaire, j’ai pris le temps de dire tout le bien que je pensais d’un élève dont je me souviendrai toujours avec beaucoup d’émotions, un élève écorché vif mais dont le courage est remarquable. Malgré son quotidien difficile et une souffrance qu’il enfouit dans son petit coeur d’enfant négligé et manquant cruellement d’attention et d’affection, cet enfant, un garçon de 10 ans , esquisse toujours un grand sourire.
Alors je lui ai dit » crois en toi, tu es un garçon attachant et gentil, un bonhomme déterminé et qui a su montrer sa hargne à vouloir se battre pour réussir. Ce sourire sur ton visage, c’est ta force, et ne laisse personne te faire croire que tu n’arriveras à rien dans ta vie ». À la fin, il baisse la tête et me dit » je voudrais dire quelque chose mais je ne sais pas si je peux » . Je le rassure et l’invite à exprimer ce qu’il a sur le coeur. Il me répond: » j’ai pleuré en classe »
Moi: « tu sais K, tu es un battant, un vrai bonhomme, il n’y a pas de mal à extérioriser ta peine. Même les plus durs pleurent et ressentent de la peine « .
Le bout de chou , 3 secondes plus tard, ne se fait pas prier, il n’en peut plus , il craque dans mes bras , il pleure , et bien qu’il tente de cacher son visage, il se laisse aller et verse de chaudes larmes.une collègue, présente elle aussi, le prend dans ses bras et ne tarde pas à verser des larmes également. Moi, je l’entoure de mon bras, je ne sanglote pas,je me l’interdis, je veux rester stoïque devant la détresse de ce gamin écorché vif qui avait avoué un jour avoir pensé au suicide.
Après avoir repris ses esprits, il vient me voir quelques instants plus tard et m’avoue que ça lui a fait du bien d’évacuer ainsi son émotion.
En 5 ans, j’avais gagné le respect de ce gamin et sa confiance. Chaque fois que je l’aidais à comprendre un exercice à l’étude, il me témoignait sa reconnaissance à sa manière, en me faisant un dessin ou en refaisant quelque chose que je lui avais appris.
Et ses derniers moments avec nous ont été des plus agréables! Comme cela m’a fait plaisir de le voir jouer et profiter de ses derniers instants d’écolier de primaire avant de se lancer dans l’aventure collège. Je ne suis pas du tout affectueuse avec les élèves, mais ils savent que je suis attentive et impliquée dans mon travail auprès d’eux, et j’ai gagné la confiance de ces enfants et leur respect. Je les ai aimés à ma manière, par la pédagogique, la fermeté, l’écoute.
Alors oui , ce dernier jour de l’année scolaire, j’ai pris K dans mes bras et je lui ai dit au revoir, et je sais que je l’ai aidé à gagner en estime de lui-même. L’espace de quelques instants, je l’ai vu vraiment heureux, et je suis satisfaite de cela. Je sais que mes paroles résonneront probablement longtemps dans son esprit. À l’heure où j’écris ces lignes, je ne peux plus retenir mes larmes. En 15 ans de carrière , je n’avais jamais ressenti une telle satisfaction.
Oui je pleure et je sais que mon petit K me manquera, que son sourire me manquera terriblement. Il était le témoignage vivant de ma réussite professionnelle à mes yeux, une sorte de gratification , le reflet de ce pour quoi j’ai choisi la vocation d’adjoint d’animation: aider chaque élève à s’épanouir et favoriser son bien-être, assurer sa sécurité physique , morale et affective, et l’aider à croire en lui et en ses capacités.
Donc à vous chère enseignante, je vous tire mon chapeau. Ce que vous faites pour ces petits êtres à qui la vie n’a pas fait de cadeau a une valeur inestimable. N’en doutez jamais.