Quelque temps après avoir hurlé de joie devant les deux magnifiques lignes apparues sur mon test de grossesse, le sang est apparu. Aussi sûrement que j’avais su, que j’avais senti que j’étais enceinte depuis le jour la conception, j’ai su, j’ai senti que c’était déjà fini. Ce que je souhaitais ne jamais jamais vivre était en train de m’arriver. Même si oui, je savais que j’avais une chance sur cinq de le vivre.
Voilà. J’ai fait une fausse couche et j’en porte encore le chagrin.
Un côté de moi se sent extrêmement coupable d’avoir encore du chagrin parce que j’ai un enfant en santé. Parce que j’ai eu la chance immense d’avoir une première grossesse et un premier accouchement sans complications. Parce que ce petit tas de cellules n’était dans mon ventre que depuis trois semaines et que ce n’était même pas encore un être à part entière. J’aurais pu tout aussi bien ne jamais savoir que j’étais enceinte. Parce que certaines femmes ont connu trois, quatre, cinq fausses couches avant de concevoir. Parce que certaines femmes ne peuvent pas concevoir tout court. Parce que certaines femmes ont perdu leur petit bout après trois, quatre, cinq mois de grossesse. Parce que certaines femmes ont donné naissance à un petit ange mort-né. Parce que certaines femmes se battent tous les jours aux côtés de leur petit trésor né trop tôt ou atteint d’une maladie grave. Parce que toutes ces femmes rendent mon chagrin indécent et je me demande de quel droit je peux m’apitoyer d’avoir vécu un événement aussi commun qu’une fausse couche précoce? « La nature fait bien les choses ». « Tu as encore le temps, tu es jeune et en santé ». « Des millions de femmes passent par là » sont toutes des vérités. Alors pourquoi ce chagrin?
Et puis il y a cet autre côté de moi. Celui qui me dit que le deuil que je porte n’est pas que celui d’un enfant. C’est le deuil de ce rêve qui a pris vie dès que mes yeux ont rencontré ces deux petites lignes roses. C’est le deuil de toutes les douces images qui sont apparues dans mon coeur et dans ma tête à ce moment-là. Ma vie avait déjà changé juste après cette seconde-là. Chaque minute qui a passé par la suite s’est écoulée au ralenti, je me suis laissé flotter sur un nuage et rien ne pouvait plus m’atteindre jusqu’à ce qu’un coup de vent emporte tout. Comme ça. C’était fini. C’est fini. Et ça fait mal.
Et ce mal est légitime et ne mérite pas d’être comparé à la douleur des autres. Parce que ce n’est pas juste. Parce que j’ai le droit d’avoir mal.
Une fausse couche, c’est un rêve qui s’éteint brusquement. Un rêve, ce n’est qu’un rêve, il y en aura d’autres heureusement. Mais chaque rêve est différent. Chaque fausse couche est différente. Le chagrin est à la mesure du rêve perdu qu’il représente et j’ai osé rêver. Peut-être trop fort. Comme des milliers de mamans. Mais peut-on réellement rêver trop grand quand on parle de l’enfant que l’on porte? J’en doute et je rêverai encore.
J’ai vécu 2 fausses couches une en novembre 94 et une en octobre 95, depuis ce temps, malgré 3 ados aujourd’hui, jy pense encore à chaque automne et la fin octobre et début novembre me fond toujours un petit pincement au cœur
Ce texte me permet de me rassurer que je ne suis pas la » seule » a souffrir même si c est égoïste de se rassurer que quelqu un d autre souffre . J ai fais une fausse couche en début de semaine et je vais mal … il a fallu me faire comprendre que C était une forme de deuil a faire même si la grossesse était récente 1 mois .. le choc est la . Et la peur de réessayer . L absence d envie de réessayer .
Merci pour votre texte …