J’ai choisi de t’annoncer cette nouvelle par l’écriture, à toi mon fils qui ne sait pas encore lire. C’est paradoxal, je sais, mais c’est parce qu’il y a une partie de moi qui ne veut pas que tu le saches et qui aimerait mieux ne pas avoir à t’annoncer ce genre de chose. J’ai pris du temps, je me devais de digérer la nouvelle avant qu’on ait cette discussion toi et moi. Le genre de discussion que l’on n’a jamais eue et qui peut avoir l’effet d’un coup de pelle au visage qui soit beaucoup plus douloureux que ceux que tu peux recevoir de ton frère lorsque vous jouez dans le carré de sable. Elle peut te sortir illico de l’innocence de tes pensées magiques de l’enfant de six ans que tu es et surtout, confronter ta perception erronée que ta famille serait éternellement présente pour toi.
J’écris et j’efface, je réécris et réefface. Une fois de plus. J’essaie de trouver les bons mots pour que tu aies le moins mal possible et je réalise qu’il n’y en a pas. Que peu importe les mots choisis, ils auront l’effet d’une bombe. Ne me reste plus qu’à trouver des mots adaptés à ton langage, à ta compréhension si restreinte de la maladie sans pour autant que la prononciation de ces mot provoque chez toi la panique. Je sais que la première chose que je vais voir dans tes yeux, c’est l’incompréhension. Tu me poseras alors plein de questions, fidèle au petit garçon curieux que tu as toujours été. Je les anticipe avec anxiété ces questions. C’est là que tu apprendras que maman ne sait pas tout, qu’elle est parfois muette et sans réponses devant certaines situations. J’ai peur de ne pas pouvoir trouver les mots pour apaiser ta douleur comme je le fais lorsque tu t’es blessé au genou en faisant du patin. C’est la première fois que je ne pourrai pas te mettre un gros diachylon sur ta blessure, que mes caresses et mes bisous ne soulageront pas ta peine. Perdras-tu confiance en mes capacités de réconfort?
Alors voilà, je me lance. Ton papi est malade. Non pas malade comme lorsque tu manques une journée d’école et que tu peux écouter tous les films de ton choix blotti contre moi. À la limite, c’est presque agréable pour toi ces moments où tu peux m’avoir à toi seul. Pour papi, ce n’est pas la même chose. Il est malade. Il y a quelque chose en dedans de papi qui essaie de gagner du terrain. Une très vilaine chose qu’on n’aurait souhaité jamais croiser sur notre route. Malade comme dans personne ne sait ce qui va arriver, ni moi ni même mamie que tu trouveras un peu différente dans les prochaines semaines. C’est la peine qui fait ça aux gens, mon amour. Ça nous rend tristes et parfois on pleure. On pleure moins souvent que les enfants, mais ça ne veut pas dire qu’en dedans, on n’a pas de bobo. Les bobos invisibles sont souvent les plus douloureux.
Papi a toujours été pour toi un superhéros. Un superhéros sans cape. Aujourd’hui, mon amour, tu apprendras que les superhéros existent vraiment, certain ne font que troquer leur cape pour une jaquette d’hôpital le temps, espérons-le, de guérir.
Bon courage mon amie, embrasse ton papa et les twins pour moi. Courage je sais que tu sera a la hauteur pour tout leurs faire comprendre se quils peuvent xoxo nancy