C’est le genre d’affaire que tu repousses. À l’infini. Si ton chum s’en mêle pas, c’est fort possible que tu clutch que tu n’as pas fait le ménage de ton char après plusieurs mois années de passivité pendant lesquelles les vieux Kleenex et les graines de pattes d’ours se sont peu à peu transformés en une matière douteuse non-identifiable; la maison de E.T. a été mise sous scellé pour moins que ça.
Ça fait que par un beau matin brumeux, tu décides que l’heure a sonné, t’abandonnes ta progéniture en pleine cueillette d’escargots dans la cour pis, armée de ta balayeuse avec un fil trop court, de quarante-huit torchons qui sentent le cadavre pis d’un mélange de M. Net pas assez dilué, tu t’élances dans ce qui transformera ton humeur en rien de moins que le plus grand massacre jamais vu depuis Jack l’Éventreur.
Premier constat, avant toute chose, tu dois désincarcérer les bancs de bébé du char. Et le terme n’est pas trop fort. Si tu ne remets pas en question la pertinence d’un système d’ancrage solide pour t’assurer que ton bébé ne finisse pas la face la première dans le windshield, force est d’admettre ta déception devant le fabuleux et incomparable système LATCH. On irradie le cancer, on ranime les morts, on va sur la lune mais on se fait chier pendant une demi-heure pour démancher un banc de bébé à grands coups de sacres, de pettage de tête dans le plafond pis de splits sur la banquette arrière. Vingt minutes plus tard, tu balances les sièges dans le gazon et tu regrettes déjà d’avoir entrepris un ménage dont le bordel aurait pu passer sous silence pour un autre bon six mois.
Ce qui se cachait sous les bancs de bébé n’a rien de reluisant. En fait, c’est littéralement en train de devenir fluorescent mais tu restes soulagée en constatant que ça ne rampe pas encore. Ce qui est certain, c’est que si on rassemblait toutes les graines de barres tendres qui s’étendent à fendre l’horizon, on pourrait sûrement approvisionner Costco en granola pour une semaine ou l’ensemble des canards qui oublient de migrer vers le sud à l’automne.
C’est à peu près là que tu plogues la balayeuse dans ta prise électrique extérieure pleine de toiles d’araignées et que tu constates que le fil est pas assez long pour se rendre au char suite à quoi tu déplaces le char en pilant malencontreusement sur le fil de ladite balayeuse nécessitant un nouveau déplacement dudit véhicule. Cinq minutes plus tard, t’es toujours au bout de ta corde mais tu te contentes d’étirer le bras pour réduire ce grand moment en train d’atteindre le paroxysme de la pénibilité.
Ça fait que tu y vas, à grands coups de balayeuse, satisfaite de la voir gober les vestiges des trois dernières années et d’entrevoir la véritable couleur de la banquette arrière. Comme tu ne fais pas dans la demi-mesure, tu tires sur les tapis mangés par le calcium depuis une douzaine de saisons question d’offrir le plus grand buffet de cailloux jamais vu à ton aspirateur dont la clameur commence à t’interpeller dangereusement jusqu’à ce qu’il s’arrête subitement et que tu sacres, convaincue qu’il s’est tout bonnement déplogué au bout de sa corde. Not. Ta balayeuse fait une overdose de cailloux.
Consciente des limites actuelles de ta patience, tu la balances à côté des sièges d’auto de bébé sur la pelouse.
T’entreprends finalement l’étape ultime de ton ménage soit le grand nettoyage du coffre qui regorge des décombres de trois ans de vie de famille. Entre un vieux cooler, deux chaises pliantes, le linge de soccer 2014 du plus vieux, la doudou portée disparue depuis six mois du plus jeune, une vieille couverte laissée là en cas de panne qui a visiblement absorbé plus de dégâts liquides que ton Swiffer, une pelle pis un balai à neige même si on est en plein mois d’août, une chandelle de secours, des piquettes de tente pis huit plats Tupperware dont le contenu est officiellement déclaré comme une matière dangeureuse par l’OMS, tu ne vois plus le gazon pis tu te demandes sincèrement où tu mettais ton épicerie jusque-là.
Ceci étant fait, tu ne shines pas ton dash parce que tu considères que c’est une perte de temps ultime réservée à la gente masculine un peu crinquée pis qu’il commence à pleuvoir à sciaux et tu te contentes d’un coup de torchon qui te confirme la présence d’une cité acarienne bien établie.
Pis c’est là que tu cries victoire ma championne. Ton char est propre comme un sous neuf à une couple de graines près dans le coffre qui n’ont pas pu être irradiées pour cause de balayeuse ballonnée. Et c’est en pensant à ton verre-de-vin-bien-mérité-parce-que-y’est-ben-midi-quelque-part-dans-le-monde que tu te retournes et que ton regard hagard croise tes sièges de bébé sur le gazon, dégoulinants du déluge qui s’abat maintenant sur leur tête comme sur la tienne.
JE TADORE! Tu me fais mourir de rire merci!!