Il fait beau. Il faut chaud. Les oiseaux chantent. Ta progéniture fait des châteaux de sable grandeur nature, joue à Marco Polo dans la piscine à qui mieux mieux, mange tes brochettes de poulet maison cuites sur le barbecue pis dort à la belle étoile, gracieuseté de tes talents de G.O.
Tes enfants, tu les entertain à la journée longue pendant deux longues semaines. Parfois quatre. Parfois six. Des fois pendant tout l’été. Dépend t’es qui, ce que tu fais dans la vie pis du salaire annuel de ton chum. Toujours est-il qu’on ne t’avait pas prévenue avant l’engrossement-en-bonne-et-due-forme que tu deviendrais une animatrice de parc à temps plein, quinze ans en plus avec la moitié de l’énergie en moins. T’as toujours détesté les parcs. Mais t’adore tes enfants.
Ça fait que te v’là, avec ton enthousiasme inégal et ta bonne humeur parfois farouche à faire des projets de bricolage Pinterest de bonhommes en cure-pipes à la pluie battante et en plein réaménagement de ta cour pour en faire un parcours moteur olympique aux premiers rayons du soleil. Parce que, même si toi tu ne te mets pas de pression, tes enfants, eux, sont toujours en mal de leur peau et s’ennuient à l’infini, réclamant d’être divertis comme le roi d’Angleterre sollicitait son fou du roi v’là deux cents ans.
Ça fait que tu donnes ton maximum en t’enfargeant les pieds et te crashant dans le divan une fois de temps en temps, question de penser à ta vie, checker ton téléphone pis te rappeler que tu as toi aussi une existence qui t’est propre. Mais pas trop longtemps.
C’est à peu près là qu’il te passe une idée complètement folle dans la tête. Une idée que seule une mère absolument épouvantable peut envisager. Rien que la pire des mères. « Il me semble que j’irais porter les enfants à la garderie/au parc aujourd’hui pis que je prendrais une journée off. » Tu caresses très longtemps et délicatement l’idée, comme une soie très rare et particulièrement douce qui coûte ben cher. Le bien et le mal de ton cerveau ont déclenché une guerre à finir à grand coup de culpabilité et d’un besoin criant de liberté. Oseras-tu abandonner tes enfants à la garderie pendant une interminable et cruelle journée de huit heures au profit de ta personne sans même avoir l’excuse de devoir faire l’épicerie pis un paquet de commissions chez Costco ?
Je te dis oui. Une journée. Deux. Trois. Une semaine si c’est ça que ça te prend. Pis je te le dis, bien à l’abri derrière mon pare-pierre, prête à recevoir les roches de toutes celles qui vont s’indigner de constater que t’es une personne à part entière qui a des besoins pis une vie au-delà de ses enfants.
T’as le droit d’avoir le goût de vedger dans ton lit jusqu’à pas d’heure. T’as le droit de partir faire une ride en bateau avec ton amant sexy chum pis d’avoir du gros fun. T’as le droit de manger des chips en bobettes dans le divan à deux heures de l’après-midi. T’as le droit d’écouter Canal Vie sans interruption pendant trois heures. Sans faire de plans pour le souper. Ni penser à la rentrée scolaire imminente. Sans essuyer de caca-pipi. Ni jouer aux blocs. Ni anticiper la prochaine fois que tu vas devoir te lever contre ton gré.
T’es une mère. T’as fait le choix d’avoir des enfants. Que tu aimes. Et tu t’occupes d’eux chaque jour au mieux de ton amour, de tes connaissances pis de tes limites.
Mais t’étais quelqu’un avant d’être une mère. Pis t’as le droit de prendre une journée off cet été pour te rappeler qui c’était et respirer l’air de la liberté qui te revient plus sans te sentir coupable d’abandonner tes enfants comme des orphelins dans un panier de paille sur le bord d’une caserne de pompiers.
Au bout de la ligne, ça ne fera de toi qu’une fille plus heureuse. Pis je connais un proverbe complètement fou qui dit : « Maman heureuse, enfants heureux. ».
En réaction à l’article Sortez vos enfants de la garderie de Bianca Longré.
Lisez aussi Les nerfs Madame Blancheville : l’heure du bain.
Laisser un commentaire