La première fois que je t’ai vu, je ne t’ai pas reconnu. Cela a eu comme conséquence que j’allais devoir vivre avec toi et te maudire pour le restant de mes jours.
Maudit herpès, je te déteste. Tu ne mérites pas que je t’appelle feu sauvage et que j’embellisse ton nom, herpès.
Tu m’as humiliée tant de fois.
Je n’oublierai jamais ce jour où j’ai dû affronter avec une lèvre purulente celui qui allait devenir le père de mes enfants, et dont j’étais secrètement amoureuse. Gentleman, il a fait semblant de ne pas te voir, pendant que je mourais de honte à l’intérieur.
Tu m’as particulièrement gâché la vie pendant la semaine qui a précédé mon mariage. Stressée que j’étais de te voir apparaître, j’ai fini par aboutir chez le docteur. J’en faisais des cauchemars d’imaginer ton gros bouton plein de pus voler la vedette du plus beau jour de ma vie. Le matin de mes noces, il faisait soleil, et surtout, surtout, surtout, tu étais absent de mon visage.
Sans cœur que tu es, tu m’as volé une partie de la magie des premiers jours de mon bébé sur terre, alors que tu as fait irruption en plein accouchement. Tu t’es sauvagement imposé entre mon enfant et moi, et j’ai dû regarder tous mes proches embrasser ma petite merveille, sans pouvoir le faire moi aussi.
Comme si tu n’avais pas assez de ma vie privée, tu m’enlèves toute mon assurance professionnelle quand je dois me rendre au travail pour affronter mes collègues et mes clients alors que tu t’es invité sans permission sur mon visage. Tu as même bousillé ma chance de faire une première bonne impression lors de cette importante entrevue pour laquelle je m’étais si bien préparée.
Quand tu es là, tu prends toute la place et je ne sens que toi dans ma face. Les gens ont beau me dire que tu n’es pas-si-pire-que-ça et qu’on ne t’avait pas remarqué, je te sens, bouton fiévreux, qui enfle, qui pique, qui chauffe, qui grossit d’heure en heure, qui bientôt dégoulinera d’un liquide jaune si gênant, pour mettre au moins dix jours à guérir. Parce qu’en plus d’être insolent, tu es vraiment trop lent.
Ne transmettre à personne la calamité que tu es devient mon obsession. Il faut faire patienter l’amoureux jusqu’à la guérison. Il faut surveiller son verre et ses ustensiles, les ébouillanter, les désinfecter. Il faut aussi faire attention de ne pas te propager à d’autres parties de mon propre corps… Il ne manquerait plus que ça, que tu t’invites dans mon œil comme tu l’as fait à d’autres, sale virus immonde.
Le problème avec toi, c’est que tu me gâches la vie même quand tu n’es pas là, quand je panique avec n’importe quel picotement et que toute rougeur me fait croire à ton arrivée imminente et catastrophique.
Si je t’écris aujourd’hui, maudit cr*sse d’herpès, c’est pour te crier ma haine alors que tu es réapparu au mauvais moment, comme tu sais si bien le faire. Tu t’es pointé pour cette soirée qui était écrite en gros sur mon calendrier depuis des mois, celle où j’allais me mettre belle et sortir en ville avec ma gang de filles. J’aurais bien envie de me mettre un sac en papier brun sur la tête, ou de me terrer chez moi et d’annuler mes plans… Mais malgré le sentiment de honte contre lequel je devrai lutter toute la soirée, je veux te dire que je ne m’empêcherai pas de vivre ma vie. Je te déteste trop pour te laisser m’abattre.
Si t’es comme moi et prête à essayer pas mal n’importe quoi, je te suggère en homéopathie Apis Mellifica 15ch. Je ne suis pas vendu homéopathie mais… roulement de tambour, ça marche pour moi. Aussitôt que ça picotte, 2-3 granules sous la langue. Tu peux répéter quelques fois à intervales de 20 minutes. J’ai sauvé un voyage en Jamaique et j’ai gagné une pause d’environ 2 ans parce que je les attrappaient à temps! J’en ai toujours dans ma sacoche!