À toi qui juges mes compétences parentales parce que mon enfant est différent,
Pendant que tu me regardes avec un regard méprisant parce que tu crois que je suis incapable d’élever mon enfant, moi, j’essaie de réfléchir à ce que je peux faire pour aider mon petit tout en essayant d’étouffer ma culpabilité. Ma culpabilité d’être incapable de réussir là où toi, tu n’as même pas à te questionner.
Pendant que tu juges la façon dont je gère la énième crise de la matinée, moi, j’envie la facilité avec laquelle tu as la chance d’éduquer ton tout-petit. Car moi, je n’ai pas cette chance. Cette chance de regarder mon enfant exceller dans un sport ou participer à la fête d’un de ses camarades. Mon enfant, moi, personne ne l’invite et il ne disputera jamais aucun tournoi sportif. Ici, simplement lui mettre une paire de bas ou lui couper les ongles constitue un défi. Mais toi, tu juges, simplement parce qu’il ne réussit pas à dire merci ou à te regarder dans les yeux lorsque tu t’adresses à lui.
Alors que tu cuisines des petits gâteaux pour l’activité parascolaire du vendredi, moi, je dois jongler avec les dizaines de rendez-vous à faire cadrer dans mon horaire, les multiples rencontres avec les spécialistes en tout genre, les incessants courriels de l’école et les innombrables plaintes de ses professeurs. Car mon petit ne supporte pas le bruit, ni les textures, ni les changements. Il ne supporte pas les lumières trop intenses ni les camarades qui tentent d’envahir sa bulle. C’est l’enfant bizarre de sa classe, celui dont les autres enfants se moquent, celui qui ne sait ni comment exprimer ses émotions, ni verbaliser ses besoins. Celui qui a besoin d’une maman comme moi. Tu sais, celle que tu juges.
Ton jugement, même si je tente de m’en protéger et d’en protéger mon enfant, me perce chaque fois comme un poignard. Il me détruit un peu plus chaque jour, m’oblige à me remettre en question dans mon rôle de mère et ce qu’il en adviendra dans l’avenir. Car alors que tu te questionnes sur la couleur du chandail à assortir au pantalon de ton cadet, moi, je me demande simplement s’il sera capable un jour de quitter la maison, d’avoir une amoureuse, un emploi. Et lorsque j’y pense trop, l’évidente réponse qui me vient me noue la gorge. Avant de me juger, j’aimerais que tu te rappelles que tu n’auras jamais à vivre tous ces deuils que je dois affronter jour après jour même si mon enfant est bel et bien vivant.
Je sais que tu ne comprends pas mon besoin d’avoir des moments de pause, du répit. C’est tellement indigne de la part d’une mère que d’avoir besoin de souffler un peu, n’est-ce pas ?
Ce que tu sembles oublier, c’est que ce n’est pas une pause de lui dont j’ai besoin, c’est un moment pour me réparer, moi, afin de rester suffisamment solide pour prendre soin de lui. Car mes blessures, aussi invisibles soient-elles, sont bien réelles et nombreuses.
Pour toutes ces raisons, ton jugement est la dernière chose dont j’ai besoin. La dernière chose que j’ai envie de gérer. Et même si je garde la tête bien droite en tentant de me convaincre que ton jugement ne m’atteint pas, c’est probablement le plus grand défi de mon rôle de maman de m’en persuader. Car malgré toutes les embûches que représente un enfant comme le mien, mon enfant, je l’ai choisi, alors que ton jugement lui, je le subis.
Maman Marginale
Maman monoparentale de 3 enfants dont 2 enfant autistes
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