maman et fillette au soleil

Je vois pointer le jour où tu ne tiendras plus ma main

Je vois pointer le jour où tu ne tiendras plus ma main. Bientôt, la tienne lâchera la mienne; bientôt, tu n’auras plus besoin de cette prise pour te sécuriser. Tes petits doigts déjà se dénouent tranquillement des miens et continueront de le faire parce que le temps occupé à filer refusera toujours de s’arrêter.

Je vois pointer le jour où tu ne tiendras plus ma main. Chaque fois que je le peux, je tente d’imprimer dans ma paume la sensation de ta toute douce petite poigne, parce que je sais que c’est temporaire. Parce que je sais que ce genre de petits moments précieux ne sont qu’éphémères. Qu’un jour, tu n’auras plus besoin de ma main dans la tienne pour traverser la rue. Ce jour, au loin je le vois. Celui qui te distanciera un peu de moi une goutte à la fois; celui où tes pas décideront de te mener un peu partout, sauf là où je suis.

Je vois à l’horizon ce moment, celui de ton envolée. J’aperçois à quelques milles de nous le tremplin qui te servira d’élan pour quitter la petite enfance si promptement consumée. Je sens tes doigts lentement se dénouer des miens pour aller découvrir le monde dans lequel je t’ai amené. Tu t’émancipes. Le temps s’empresse de voyager, mais il est impossible de freiner sa lancée.

Je vois diminuer les fois où tu as besoin de mon aide pour t’habiller le matin ou pour couper en petits morceaux tes aliments. S’épuisent aussi un peu plus chaque jour les œillades pour t’assurer que je suis près de toi. J’aimerais pouvoir attraper au vol les minutes, les jours, les mois qui se dissolvent un peu trop hâtivement, mais en même temps il y a du beau dans le fait de te voir t’épanouir. De voir dans ton dos ces ailes pousser. Doucement s’ouvrir.

Oui, je vois pointer le jour où tu ne me tiendras plus la main. Je suis fière de toi, mais remplie de contradictions; c’est tellement déchirant d’accepter le fait que ce sera à toi de faire ton petit bonhomme de chemin. Sans trop m’imposer, je serai toujours là, mais je sais que ce sera un défi de te regarder avancer sans vouloir te guider à l’excès. Tu feras tes propres constats durant ton parcours ; tu vivras une succession d’expériences que ton âme a déjà accepté de vivre avant de naître. Mon rôle est de te préparer du mieux que je le peux à les affronter, car on va se le dire, elles ne sont pas toujours gage de sourires.

Je vois pointer le jour où tu ne me tiendras plus la main. C’est beau, te voir conduire toi-même ton petit train.

Je vois pointer le jour où tu ne me tiendras plus la main. Je vois ce jour arriver, quelque part là-bas, au loin. Et même si c’est magnifique de te voir aller, de te voir grandir, laisse-moi te souffler ce petit secret : j’espère que ce jour ne sera pas demain.

Crédit : Slava Dumchev/Shutterstock.com

Vanessa Fuoco

Maman imparfaite (et maintenant séparée) d'une petite puce si adorable et si têtue, depuis janvier 2018, j'essaie de retrouver mon équilibre, qui en fait a toujours été une quête bien sinueuse. L'écriture, tout comme la spiritualité, la musique, le chant et la création sous toutes ses formes ont toujours eu une place de choix dans ma vie. Ma plume : une alliée, mon remède, mon déversoir de mots et de maux. Je suis une sensible (trop), une rêveuse (encore trop), une douce à la fois forte qui est passée par un lot de chemins rocailleux et qui tente d'avancer malgré tout, sereinement (encore à la recherche de cet état doux et calme). J'espère toucher plus d’une maman pour que nous nous sentions moins seules, ensemble.

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