Petite maman, je te vois quand tu jettes un œil à tes petits qui jouent au parc tout en faisant défiler ton fil d’actualité Facebook, seul moment de repos dans ta journée avant que les enfants soient au lit. Je vois aussi le regard de ceux qui se permettent de te juger sans avoir marché dans tes souliers.
Petite maman, je te vois les matins de semaine quand tu t’habilles en un éclair sans trop prendre le temps de te coiffer et te maquiller pour consacrer toutes les précieuses minutes qui te séparent du départ de la maison à la gestion du déjeuner, des lunchs, de l’habillage et des crises en tout genre. Je te vois sortir de la maison avec ton sac à main, deux sacs à dos et le doudou de ton bébé dans les bras. Je te vois attendre patiemment, d’autres fois moins, que ton deux ans s’attache « tout seul ».
Petite maman, je te vois arriver au travail les cheveux en bataille et le souffle court alors qu’il est à peine neuf heures. J’entends ton soupir de soulagement lorsque tu t’assois à ton bureau et que tu bois ta première gorgée de café chaud alors que tu es pourtant levée depuis trois, quatre ou cinq heures.
Petite maman, je te vois quand, sur l’heure du dîner à ton travail, tu multiplies les minutes d’attente en ligne pour prendre rendez-vous chez le dentiste, le médecin ou l’orthophoniste en grignotant ta sandwich au jambon composée des croûtes du pain tranché que le reste de la famille a englouti sans jamais te prévenir qu’il en restait si peu ni considérer que tu voudrais peut-être aussi en manger.
Petite maman, je te vois quand toute la famille quitte la table et te laisse en plan avec la vaisselle sale, les dégâts de sauce à spaghetti et la bouteille de ketchup encore ouverte. Je te vois quand tu sacres dans tes joues en passant la balayeuse, déplaçant à l’infini les montagnes de jouets que tu as demandé à tes enfants de ranger en vain. J’entends ton soupir quand, une fois le matin venu, tu te lèves et constates que le père de tes petits a encore laissé traîner les restes de son snack de fin de soirée sur la table du salon.
Petite maman, je te vois quand le vendredi arrive et que tu entrevois la fin de semaine comme une montagne plutôt que deux jours de congé. Je te vois calculer quand entreprendre ta nouvelle brassée de foncé pour qu’elle ne croupisse pas dans la laveuse pendant le cours de soccer du plus jeune. Je te vois marcher d’un pas pressé dans les allées d’épicerie pendant le cours de danse de la plus vieille.
Petite maman, je te vois encourager tes enfants lors des matchs de sport même si tu as dû te lever à six heures un jour de fin de semaine pour les y accompagner. Je te vois préparer des biscuits à huit heures le soir pour que tes petits aient un bon dessert maison à se mettre sous la dent le lendemain. Je te vois coudre des costumes et participer à la création de projets artistiques la veille de leur remise.
Petite maman, je te vois quand, une fois la maisonnée endormie, tu t’effondres dans ton lit et tu verses des larmes de doute et de culpabilité. Je te vois te questionner à savoir si tu as bien réagi quand ton petit s’est emporté, si tu as été assez constante et bienveillante et te taper sur la tête parce que tu as crié.
Petite maman, je te vois quand tu es malade, mais que tu continues de prendre soin de ta famille comme si tu ne l’étais pas. Je te vois quand tu te réveilles la nuit pour moucher des nez, donner du sirop ou siphonner les voies nasales de ton bébé avec le mouche-bébé dont vous avez tous les deux horreur. Je te vois t’absenter du travail pour aller chercher ton petit qui vient de vomir à la garderie ou ta plus vieille qui est tombée dans la cour d’école.
Petite maman, je te vois, je t’entends et je reconnais le travail colossal que tu abats chaque jour par amour pour tes enfants. Contrairement à ce que tu penses trop souvent, tu n’as pas besoin d’être plus forte, plus résiliente ou plus efficace car tu es assez. Ce dont tu as besoin est d’un soutien tangible. Ce dont tu as besoin est que tout ce que tu fais au quotidien soit reconnu. Ce dont tu as besoin est d’être vue et reconnue.
Et dans l’attente que les gens réalisent l’ampleur du travail qu’est le tien, dans l’attente qu’ils constatent tout ce que tu fais dans une journée pour les tiens et qu’ils t’offrent enfin le support que tu mérites depuis le jour où tu es devenue maman, sache que moi, je te vois.
Wow. Quel texte magnifique. Merci.