Je vois bien que tu ne m’aimes plus

Je vois bien que tu ne m’aimes plus. Toi, que je n’ose plus appeler mon chum, mon amoureux. Toi, avec qui je partage tant mais rien à la fois. Parce que si nous partageons encore la même maison et le même quotidien, c’est très peu pour que mon cœur soit complètement comblé. J’aimerais tenir bon ainsi toute ma vie, le cœur asséché, pour assurer une stabilité aux enfants, mais la vérité c’est que je ne pourrai pas vivre bien longtemps sans tendresse à pelletées et amour à profusion. Nos enfants sont encore petits et je ne pourrai pas attendre qu’ils soient grands pour partir à la quête d’un amour réciproque et rassasiant, d’un amour à partager et à savourer à deux, avec lequel grandir et avancer dans la vie jusqu’à mes vieux jours.

Je vois bien que tu ne m’aimes plus. J’aimerais entendre ton cœur battre pour moi à des milles, te voir te démener pour sauver notre duo, mais je le vois venir : tu ne ressens plus d’amour pour moi et nous ne pourrons jamais plus être de ceux qui se tiennent par la main en avançant vers un doux futur à deux. Tu n’éprouves plus de plaisir à passer du temps avec moi. Tu préfères mon absence à ma présence. Tu cherches à me fuir. C’est très évident, même si j’essaie de revêtir mes lunettes fumées en te regardant agir. Pour ne pas me l’avouer. Pour me faire croire encore rien qu’un peu que je suis celle que tu veux à tes côtés jusqu’à la fin.

Je vois bien que tu ne m’aimes plus. Tu ne veux plus frôler ma peau, la beurrer de délicatesse. Tu ne veux plus que nos lèvres s’unissent comme jadis. Ton corps ne réagit pas à ma présence et ça fait mal de le constater. Le regard que tu poses sur moi est terne, sans éclat, sans désir. Je vois bien qu’il n’y aura pas de retour en arrière. Qu’on partage peu de choses mis à part les enfants et quelques repas. Ton inconfort lorsque tu es seul avec moi est palpable et lourd de sens. Pourquoi t’efforces-tu de le camoufler ? Pourquoi ne me dis-tu pas ces mots certes difficiles à exprimer mais qui sont si douloureux pour moi à deviner ?

Je vois bien que tu ne m’aimes plus. J’ai peur de t’en parler car je sais que j’ai raison et je crains de t’entendre l’exprimer de vive voix, comme une preuve tangible du fait que ton cœur s’est débranché du mien. Je sais que de passer ta vie avec une amie ne te convient pas. Je sais que tu aimerais en aimer une autre plutôt que de rester toute ta vie avec une colocataire. Je sais qu’au fond, une vie sans amour et tendresse ne t’enchante pas. Que tu veux protéger les enfants en t’armant de ton mutisme et en faisant comme si tout allait bien. Le hic, c’est que bien que je me préoccupe des enfants moi aussi, je veux me sentir aimée et désirée. On est encore jeunes et je souhaite encore vibrer sous les mains d’un homme et partager les doux moments que seuls les amoureux savent créer entre eux. J’aimerais que tu me le dises enfin. Que tu libères les mots fatidiques et qu’on prenne des chemins différents pour se permettre d’aimer réellement à nouveau et d’être aimés comme on le mérite.

Je vois bien que tu ne m’aimes plus. Je me questionne sur l’image de couple que l’on renvoie à nos enfants. J’aimerais qu’ils voient leurs parents se bécoter devant eux. Je voudrais qu’on soit complices et amoureux et qu’ils en soient les fiers spectateurs. Je ne veux pas qu’ils se rappellent de leurs parents froids l’un envers l’autre. Je ne veux pas qu’ils te voient indifférent devant la belle robe que je porte dans le temps des fêtes. Je souhaite qu’ils te voient les yeux illuminés d’amour pour leur mère afin qu’ils puissent à leur tour, un jour, chercher la même relation douce à partager. Et s’ils ne le voient pas dans tes yeux à toi, j’aimerais qu’ils puissent l’apercevoir dans ceux d’un autre qui me verrait telle. Je souhaite qu’ils aperçoivent dans ton regard, la fascination que tu aurais en regardant une autre femme que tu aimerais réellement et qui deviendrait possiblement leur belle-maman. Je veux que notre fils enveloppe sa future amoureuse avec tendresse, douceur. S’il te prend comme modèle en ce moment, comment y arrivera-t-il ? Je veux que notre fille n’accepte rien de moins qu’un homme qui la traite bien, mais si elle me voit rester là où mon cœur est insatisfait, comment fera-t-elle pour faire des choix sains en amour ?

Je vois bien que tu ne m’aimes plus. Que tu n’es pas heureux et que tu te forces pour les enfants. Tu fais semblant d’être bien, mais certaines choses te trahissent. Tu voudrais être ailleurs, me laisser aller à la rencontre de quelqu’un qui me comblerait. Tu as peur de me blesser, mais ça me blesse encore plus de comprendre que tu ne restes que pour les petits et que tout te semble être un fardeau entre nous. J’ai peur de te demander la question qui tue, mais nous devrons un jour ou l’autre crever l’abcès et il serait mieux pour tous les deux que l’on n’attende pas qu’on soit grisonnants. Les enfants le sentent, malgré nous. Peut-être pourrions-nous leur montrer le bon exemple en choisissant d’être plus heureux, séparément ? Je veux être aimée. S’il te plaît, regarde-moi dans les yeux et dis-moi la vérité. Tu me dois au moins ça.

Je vois bien que tu ne m’aimes plus.