Grand-père,
On n’a jamais été très forts toi et moi pour les au revoir, ni pour les mots en général. On s’est toujours tout dit du regard et aujourd’hui je ne trouve plus écho à mes messages, mais je sais que tu n’es pas loin. Dans le bruissement des feuilles d’automne. Dans le sourire d’un enfant croisé dans la rue. Dans le rayon de soleil qui traverse mon salon le dimanche matin. Dans l’immensité d’un ciel étoilé, et dans chacune de mes pensées.
Comment imaginer mettre au monde mon bébé sans toi, sans mon repère qui, comme une balise en mer, me rappelait toujours que rien n’était perdu et que je n’étais jamais bien loin de la maison. Seras-tu là lorsque mon cœur de maman sera fatigué et lourd de ne pas se sentir à la hauteur ? Lorsque je me sentirai incapable d’aimer autant que toi et que je douterai de mes forces ?
J’aurais voulu que mon bébé sache tout de toi. Qu’il connaisse lui aussi ce regard protecteur et complice rempli d’un subtil mélange de fierté et d’une infinie tendresse. J’aurais voulu qu’il apprenne près de toi que la vie est comme un long voyage en mer pour lequel il faut choisir son bateau avec précaution et ne jamais oublier que la famille est le seul radeau permettant d’affronter les plus puissantes tempêtes. J’aurais voulu qu’il puise à son tour dans tes yeux la force de se battre pour ce qui lui sera essentiel et indispensable pour arriver à bon port. Tu n’es plus là pour réaliser ce souhait, mais je sais qu’une étoile brillera désormais pour l’aider à retrouver son chemin dans le vaste océan de sa vie.
Je ferai de mon mieux, jour après jour, vague après vague, pour lui transmettre ce que tu m’as appris de plus important. Que l’amour est la clé, la grande voile qui le mènera au bout de son voyage. L’amour simple mais vrai, celui qui se passe de mots et d’artifices, celui que l’on retrouve autour d’un repas que l’on partage avec sa famille réunie. Celui que l’on reconnaît dans un regard d’encouragement, la douceur d’une main sur l’épaule ou la tendresse d’un baiser sur le front. Je lui dirai, grand-père, combien tu aurais aimé le connaître, le serrer fort dans tes bras, caresser ses joues, le voir courir et jouer sur la terre que tu as retourné de tes mains et sur laquelle j’ai grandi moi aussi. Sache que où que tu sois, de là d’où tu viens restera toujours quelque chose de toi.
Mon ventre s’arrondit et le temps qui file m’éloigne peu à peu de celui que l’on a partagé tous les deux, mais me rapproche un peu plus de la plus belle rencontre de ma vie. J’ai peur qu’il efface mes souvenirs et qu’il embue les traits de ton visage, mais j’ai hâte qu’il me révèle celui de mon enfant. Alors dans le silence que tu as laissé, j’espère secrètement qu’il aura tes yeux.
Bon voyage.
Bonjour ce texte raisone en moi c’est toute mon histoire j’apprenais que j’étais enceinte et mon papa décédais 7jrs apres! d’un AVC.
J’ai pu lui annoncer la merveilleuse nouvelle sur son lit d’hôpital. Beaucoup de sentiments remonte en vous lisant.
Ces mots sont juste et beaux.
Merci