Cher allaitement,
Il est maintenant le temps de se dire au revoir après avoir longuement partagé notre quotidien.
Je me rappelle encore notre première rencontre. Nous étions deux inconnues qui ne savaient pas comment s’approcher. J’avais beau avoir entendu parler de toi et m’être préparée à ta venue, je ne réalisais pas encore qu’il me faudrait du temps pour t’apprécier. Suite à mon accouchement, beaucoup de gens m’ont répété ton importance dans le but qu’on s’entende bien avant de repartir ensemble à la maison et j’ai trouvé notre rencontre difficile. Tu prenais beaucoup de place et j’ai eu l’impression qu’on t’imposait à moi.
Une fois que nous nous sommes retrouvées seules à la maison, je n’ai pas pu m’empêcher de verser quelques larmes. Je n’avais pas l’impression qu’on se connaissait assez pour être laissés à nous-mêmes. J’avais peur de ne pas être capable de cohabiter avec toi, peur que nous soyons incompatibles. Peur que mon corps ne produise pas assez de lait, peur de ressentir cette douleur chaque fois que je mettais mon bébé au sein, peur de vivre un échec avec toi.
Durant les premiers temps, tu m’as vraiment fait souffrir. Chaque fois que j’étais en ta présence, j’avais l’impression que tu me déchirais la peau. Parfois, tu me donnais même l’impression de revivre les contractions de mon accouchement. À plusieurs moments, je me suis demandé pourquoi je m’imposais ta présence. Je te trouvais tellement accaparante. Tu prenais littéralement tout mon temps. Quand je pensais à la journée qui prenait fin, j’avais l’impression d’avoir été constamment avec toi. Matin, midi, soir et même la nuit, de huit à douze fois par jour pendant des périodes de quarante-cinq minutes à une heure, il n’y en avait que pour toi. Heureusement que j’ai été accompagnée, sinon j’aurais bien pu t’abandonner. On m’a montré différentes façons pour être plus confortable et plus efficace en ta présence. On m’a aussi aidé à réparer les dommages que tu avais causés.
Une fois ce dur moment passé, les choses ont commencé à s’améliorer. Nous nous connaissions davantage et nous arrivions à mieux nous entendre. J’étais contente d’avoir persévéré malgré les difficultés puisque je pouvais maintenant apprécier les moments que je passais en ta compagnie. J’arrivais enfin à voir les bons côtés de t’avoir dans ma vie. Je te trouvais pratique puisque tu étais toujours là lorsque j’en avais besoin. Tu me tenais compagnie durant les nuits où bébé avait besoin de réconfort.
Au fil du temps, tu m’as permis de passer de doux moments avec mon enfant. Grâce à toi, j’ai pu développer un lien fort avec lui puisque tu me permettais de le rassurer et de lui procurer tout ce dont il avait besoin. Même si nous avons vécu quelques petites rechutes, en passant par les fameuses mastites et les canaux bouchés, nous avons somme toute eu une belle histoire.
Je suis très heureuse des moments que nous avons passés ensemble, mais il est maintenant temps pour moi de reprendre possession de mon corps. C’est pourquoi je dois te dire au revoir.
Si jamais nos chemins ont à se recroiser, il me fera plaisir de t’accueillir à nouveau, telle une vieille amie.
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