Aujourd’hui, j’ai décidé de te parler de l’impact de la naissance des enfants sur ton couple et ça se peut que ça ne te fasse pas très plaisir. Note qu’il est tout à fait possible que les choses se passent autrement dans ton couple mais que la situation décrite est pas mal fréquente.
Quand je pense au couple suite à la naissance d’un enfant, je pense toujours à l’histoire des trois petits cochons. Le punch, c’est que la maison (de foin, de bois ou de pierre dépendant de sa force), c’est ton couple et le loup, c’est ton nouveau-né. Je sais, je sais, il est rose et innocent comme un petit cochon mais ne te laisse pas berner, je te le dis, c’est le loup. Bon, entendons-nous, il n’a pas postulé pour le rôle. On va plutôt dire qu’il lui est revenu par défaut. Reste qu’il a beaucoup de souffle et que ta maison n’est pas trop à l’abri et que ton couple a tout intérêt à être en briques si tu n’as pas envie qu’il finisse en terrain vague.
Le premier coup de grâce qui frappe ton couple suite à l’arrivée du loup, c’est la fatigue. Quand ça fait six mois que tu dors en moyenne deux à trois heures par nuit, la longueur de ta face devient rapidement inversement proportionnelle à celle de ta patience. Normalement, celles de ton chum suivent la même tendance. Ceci étant, même si vous avez un bébé neuf qui fait l’envie de toutes les grand-mères au centre d’achats, vous avez la mèche courte et vous prenez l’habitude de vous parler assez bête. Si ta maison est en foin, son toit est pas mal dégarni à ce stade-ci, mais elle tient toujours debout.
C’est là que tu te mets à jouer au jeu du martyr. Ça commence habituellement par un sentiment d’amertume sournois; tu as l’impression de tout faire pendant que ton chum ne fait rien pantoute. Des fois c’est le cas, d’autres fois ça ne l’est pas. Dépend du chum et du moment. Ce sentiment-là prend normalement une ampleur effrayante quand son congé de paternité finit et que tu passes tes grandes journées à la maison à bercer, nourrir, laver et distraire le loup qui souffle sur ta sérénitude, tout en faisant le lavage des pyjamas plein de vomis trois fois par jour, la préparation de purées santé, la vaisselle des accessoires desdites purées et les quatre cents tâches connexes. Quand ton chum revient de travailler, qu’il s’échoue sur le divan et qu’il te dit qu’il est crevé, les yeux veulent te sortir des orbites et tu manques t’évanouir. Non mais quoi, il se prend pour qui, lui, pour revenir de sa journée de travail crevé quand tu as passé la tienne à jouer l’esclave d’un enfant de six mois en torchant la maison de fond en comble ? À ce stade-là, tu transpires normalement l’amertume et tu consacres tes temps libres à lui faire sentir qu’il n’est clairement pas à la hauteur de tes attentes sans verbaliser lesdites attentes parce qu’il devrait savoir d’emblée quoi faire. Deuxième coup de grâce. Ta maison de foin n’est plus.
Six mois après ton accouchement, aucune sortie en amoureux à l’horizon. (…) Non, aller à la pharmacie acheter des couches pendant que ta mère jette un œil sur le petit n’est pas admissible dans cette catégorie. Le problème, c’est que c’est fondamentalement impossible pour toi de laisser ton bébé à quelqu’un d’autre qui ne porterait pas ton nom, n’aurait pas ta face et ne s’appellerait pas toi-même. Premièrement parce que tu l’aimes trop. Deuxièmement parce que tu as trop peur qu’il s’étouffe avec son pablum. Troisièmement parce que tu as clairement trop peur de manquer le moment ultime où il va tenir assis plus de deux minutes sans support ou l’instant mémorable où il va tirer Sophie la girafe à plus d’un pied. Quatrièmement et finalement parce que tu n’as plus de vie en dehors de ton bébé parce que tu t’y consacres à temps plein jour et nuit et tu ne peux plus te figurer faire autre chose que t’en occuper toute la vie, pour toujours. Coup de grâce numéro trois. Si ta maison est en bois, elle commence à en arracher.
Le dernier coup de grâce, tu t’en doutes bien, c’est l’extinction du sexe qui n’est ni plus ni moins que le résultat de tout ce qui est venu plus tôt. De un, t’es crevée. Tu passes la plupart de tes journées cernée jusqu’aux coudes, en jogging et encrassée dans ton sébum parce que l’alternative d’une longue douche chaude est aussi envisageable que le concept de perdre les vingt livres qui te collent aux hanches en faisant des redressements assis. De deux, ce même vingt livres qui te sert de mou de ventre a le don de te faire sentir sexy comme un pneu crevé. As-tu déjà vu ça toi, un pneu crevé avec de la libido ? De trois, le jeu du martyr enraye pratiquement toute trace de désir à l’égard de ton chum que tu regardes pas mal plus avec des couteaux qu’une lumière charnelle dans les yeux et finalement, force est d’admettre que votre sortie bisannuelle à la pharmacie ne vous a pas permis de vous retrouver. Là, même si ta maison est en briques, elle a besoin d’un homme à tout faire, ça presse.
Finalement, tu ne l’as pas vu venir mais un an plus tard, le loup a soufflé fort. Même si votre maison tient toujours debout, elle a sérieusement besoin d’un coup de scellant pour éviter les infiltrations d’eau. C’est sournois, tu sais, les infiltrations d’eau. On ne prend pas ça au sérieux, on se dit que c’est mineur, qu’on peut vivre avec et on laisse ça aller… longtemps. En plus, de dehors, rien n’y paraît. Mais ça gruge les charpentes. Ça fait que sors ton Epoxy, donne un marteau et des clous à ton chum et patchez les trous. Rappelez-vous qui vous étiez avant l’arrivée du Grand Méchant Loup et ne le laissez pas vous dévorer tout rond.
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