Chère année 2020,
Tu viens de nous quitter pour, je l’espère, une année plus douce, plus normale. Malgré les imprévus et la multitude de frustrations vécues depuis le début de la pandémie, j’aimerais te dire merci.
Car ce fameux vendredi 13 de mars, oui, la population bien nantie de laquelle je fais partie s’est retrouvée brimée dans ses libertés. Petit à petit, tous les privilèges que j’avais pris pour acquis m’ont été soutirés, un à un, sans mon autorisation. Brimée dans mes choix, mes loisirs, mes allers et venues, j’ai d’abord crié à l’exagération. Puis à l’injustice, pour, au fil du temps, réaliser que le bonheur se trouve dans les petites choses qui elles, ne pourront jamais m’être dérobées.
Merci, 2020, de m’avoir donné le temps. Le temps de souffler, le temps de m’arrêter, le temps de simplement m’asseoir afin de respirer par le nez – ce que je fais rarement depuis que les enfants sont nés. Enfin, j’ai pu m’accorder des pauses, le samedi entre autres, pour faire la grasse matinée, errer dans le confort de mon pyjama et boire mon café chaud, cette habitude que j’avais perdue à l’expulsion de mon placenta. Ce stop obligé à la sacro-sainte routine, je dois avouer qu’il a été plus qu’apprécié.
Merci, 2020, d’avoir fait de moi une experte en lâcher-prise, moi qui clame haut et fort que certaines règles sont faites pour être transgressées, je n’ai eu d’autre choix que de me plier à ces nouvelles contraintes imposées en travers de la gorge par nos dirigeants. Force est d’admettre que c’est hautement contre ma nature, de me transformer en citoyen on-ne-peut plus obéissant, mais pour la santé de tous, j’y ai cru. J’ai aussi cru bon d’accepter l’aide qu’on m’a offerte, de mettre mon orgueil de côté et admettre que moi aussi, j’ai le droit au support d’autrui.
Merci, 2020, de m’avoir ouvert les yeux afin que je réalise que le paradis, c’est ici. Que je n’ai pas besoin de m’envoler à Cayo-du-Lointain pour boire mon margarita et faire des câlins à ceux que j’aime. Qu’avec un peu de volonté et beaucoup de jus de bras, il est possible d’aménager une cour, quelques pièces de la maison, pour enjoyer son chez-soi comme on le ferait dans un tout-inclus. Que ce qui est tout près, on finit par ne plus le voir et vouloir aller ailleurs chercher un gazon plus vert.
Merci, 2020, de m’avoir fait découvrir de nouveaux sentiers pédestres, de nouvelles forêts, de nouvelles rivières. D’avoir débloqué autant d’heures dans mon agenda, à la fermeture des écoles, pour emmener ma progéniture s’émerveiller devant tant de beauté, tant de simplicité. D’une simple feuille aux bestioles qui gambadaient tout près, du chant des oiseaux au bruissement du vent, j’ai revu les petits bonheurs dans toute leur splendeur. Les enfants me remerciaient, et aujourd’hui, je te rends la pareille.
Merci, 2020, de m’avoir recentrée sur mes valeurs profondes. Car s’il y a une chose que je retiens de ce contexte inhabituel, c’est que je suis entourée de bonnes personnes, et que mon conjoint et moi avons développé une tolérance, une patience et une résilience hors du commun. Ce n’est pas donné à tous d’être dans une bulle à cinq, quatre ou même deux. Oui, mes parents, ma nouvelle nièce, mes amis me manquent. Mais je remercie la vie d’avoir créé et rencontré d’aussi beaux humains qui m’ont permis, le temps de quelques mois, de m’arrêter afin de prendre conscience de toute la chance que j’ai. Il aura fallu ton passage pour que je réalise que je suis une privilégiée.
À toi 2020, je lève mon verre. Et je tourne la page vers un ciel plus bleu, entourée, j’ose l’espérer, d’encore plus de gens avec qui partager les petits bonheurs que tu m’auras fait redécouvrir.
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