À toi, mon enfant qui se demandera sûrement un jour pourquoi j’ai choisi de m’établir en région,
Depuis ta naissance, nous habitons dans un coin de pays lointain, rempli de lacs, de forêts et d’air pur.
Chez nous, à moins de sept petites minutes de la maison, tu fais de la raquette, du ski de fond, du vélo de montagne, de la marche en forêt, du camping, du bateau, de la motoneige et du quatre roues.
Pour l’instant, la forêt au coin de la rue est ton terrain de jeu; pour toi, rencontrer un renard est pratiquement normal, tu sais mettre un ver de terre sur un hameçon, tu connais la différence entre un cerf et un orignal et adores aller ramasser des bleuets.
Pourtant, je sais que bientôt, peut-être un peu trop vite, tu me chanteras la ritournelle des adolescents du coin à savoir que c’est « un trou perdu ici » et qu’il n’y a rien d’intéressant à y faire et je te comprendrai un peu, puisque par ma faute, la ville est pour toi synonyme de divertissements, de folies et de lumières.
C’est vrai qu’en ville, tout va très vite; les autoroutes, les lumières, le trafic, les amuseurs publics, le métro et les gros buildings stimulent dangereusement l’oeil quand tu es habitué à voir plus de mouches dans le ciel et de poissons dans le lac que d’humains dans une journée. Mais ce que je veux que tu gardes en tête, c’est que tout ça, ça fait son temps. Que le métro, quand tu le prends cinq jours semaine pendant cinquante semaines, ça devient aussi plate et anodin que lorsque tu vois une couleuvre au parc pour la trente-cinquième fois de l’été. Avec le temps, la magie arrête d’opérer.
Ne te méprends pas sur mes intentions; loin de moi l’idée de te faire croire que la ville est moche ou qu’il ne fait pas bon y vivre. Au contraire, je te souhaite d’aller y faire un tour, d’y vivre même quelques années le temps de tes études ou le reste de ta vie. Je te souhaite de savoir en profiter de la jungle urbaine, de ne pas avoir peur du trafic et des gens. Je te souhaite de barboter comme un petit poisson dans l’eau dans le centre-ville et de t’y sentir bien.
Mais je te souhaite aussi de continuer d’apprécier barboter dans cette région pleine de nature d’où tu viens. Je te souhaite de comprendre que je n’aurais pas pu te faire goûter à toutes les belles activités que nous avons partagées si nous avions été en ville. Pour plein de raisons.
Parce qu’ici, « être pogné dans le trafic après le travail », c’est prendre quinze minutes à en revenir plutôt que cinq.
Parce qu’ici, un papa qui termine à seize heures peut très bien aller reconduire son enfant à son cours de natation de 16h45 à l’autre bout de la ville.
Parce qu’ici, la forêt s’étend à l’infini et tu peux faire de nouvelles découvertes chaque fois que tu y joues.
Parce qu’ici, nous avons droit aux plus beaux couchers de soleil sur le lac.
Parce qu’ici, ça bouge beaucoup parfois, mais il est toujours facile de trouver un endroit calme pour se poser.
Parce que ici, le voisin a un nom; il est le fils, l’ami, le frère de quelqu’un que nous connaissons forcément et notre proximité crée un véritable village, une famille qui se soutient.
Parce qu’ici, le temps passe à la vitesse qu’on lui autorise, pas celle qu’on nous impose.
Parce que ici, même sans électricité, ton ciel demeure illuminé par les millions d’étoiles et les aurores boréales.
Parce que ici, l’éloignement a forgé des liens et que toute la communauté tricotés serrés et que ici, tout le monde se sent un peu responsable de l’autre.
Mon enfant, si un jour l’envie de voyager te prend, cours, va, mais n’oublie jamais d’où tu viens.
Un véritable arc-en-ciel, tout dans la lumière de Dieu.
Merci,! J’ai décidé de revenir chez moi.
Merci pour ce beaux texte! Je me suis revue au travers ses lignes! Voyagé après mon secondaire ensuite le cegep en ville, 5 ans à jouer dans le traffic. En 2008, j’ai choisi de revenir m’établir dans ma ville natale, à la Baie-james, Matagami. J’y élève mes deux enfants! Je sais que j’ai fais le bon choix.