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Lettre à ma mère atteinte d’une maladie mentale

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Chère maman,

Plus tôt aujourd’hui, tu t’es excusée d’être malade. Tu t’es dite désolée de m’avoir amenée à grandir dans ta maladie, d’avoir dû assister aux montagnes russes de tes émotions. Pourtant maman, j’ai quand même envie de te remercier d’avoir pu me permettre de m’épanouir à travers les défis de ta santé mentale.

C’est vrai que je n’ai pas vécu une enfance sans tracas ni bémols. Je n’ai pas vécu une enfance « normale » parce que tu as su m’apprendre, année après année, que ce mot-là n’est souvent que perception, que la normalité, ce n’est pas grand-chose quand on y pense.

C’est vrai aussi que j’ai parfois dû endosser le rôle de l’adulte avant le temps. Que j’ai dû jouer à la mère parce que tu n’allais pas bien. Que c’était plus simple si je m’occupais de toi que si j’attendais l’inverse. Pourtant maman, j’ai quand même envie de te remercier d’avoir su me guider à travers les défis de ta santé mentale.

Parce qu’à travers tes rechutes et tes rebonds, tu as su m’enseigner la résilience. Tu as su me démontrer la persévérance. Parce qu’avec toi, mes chutes ne m’ont jamais semblé fatales et les défis à relever trop lourds. Parce qu’avec toi à mes côtés, je savais que c’était possible de tomber et réussir à se relever. Tu as su me montrer que demain peut toujours être bien, mieux. Que le soleil brille souvent plus fort quand il s’est caché trop longtemps. Parce qu’avec toi, maman, j’ai vu que tout était possible à qui le veut bien, à qui est prêt à se battre.

J’ai longtemps, en grandissant, souhaité que tu ne sois pas malade. J’ose même t’admettre que j’aurais voulu que tu sois comme la mère de mes amies. En bonne santé mentale. Puis, j’ai vieilli et j’ai compris que je n’aurais voulu d’aucune autre mère comme modèle. Grâce à toi, maman, j’ai grandi dans un monde sans non-dits, sans tabous. Tu as su m’enseigner la nécessité de prendre soin de soi, de s’écouter. Tu as su me démontrer que le jugement ne sert à rien et qu’il n’aide personne. Tu as su me faire voir que chaque humain possède en lui des trésors et des naufrages. Grâce à toi maman, j’ai su être ce type d’humain qui prend le temps de voir avec son cœur au lieu d’avec ses yeux.

Si je prends le temps de t’écrire aujourd’hui, c’est que tes excuses m’ont fait réfléchir. C’est vrai, maman, que j’ai grandi bercée plus souvent par ta maladie que par tes bras, mais je reste quand même convaincue que c’est ton authenticité face à tes problèmes de santé qui a fait de moi la femme que je suis maintenant  : ouverte et empathique.

Chère maman, aujourd’hui, tu t’es excusée d’être malade. Tu t’es dite désolée de m’avoir amenée à grandir dans ta maladie. Pourtant maman, aujourd’hui, j’ai vraiment envie de te remercier de m’avoir aimée assez pour me permettre de comprendre les autres sans juger. Parce qu’au travers tes défis, tu m’as permis de savoir que la vérité reste la plus belle chose qu’on peut offrir à nos enfants même si on aimerait parfois les protéger en les mettant à l’écart de ce qui ne va pas. Tu m’as appris à faire confiance en la capacité de compréhension de mes enfants, tu m’as donné l’envie d’être honnête et authentique avec eux.

Maman, j’apprécie tes regrets, mais je ne t’en veux pas. Si aujourd’hui, je tente de léguer à mes enfants un monde plus ouvert, moins violent et plus résilient, c’est bien grâce à toi.

Je t’aime.

Crédit : Andrey Bondarets/Shutterstock.com

Phonzine

Être la maman de trois fabuleux garçons occupe principalement mon cœur, ma tête et mon esprit. À travers d’eux, je m’épanouis, j’apprends et je me transforme. Le reste du temps, je tente de demeurer une femme complète et heureuse et je crois pouvoir affirmer que j’y arrive plutôt bien ! Je suis de celles qui ne se définissent pas uniquement en tant que maman et qui n’ont surtout pas la prétention d’être parfaite. À bas les tabous !

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3 Comments

  • Salut, je voulais te remercier d’avoir partagé ce texte envers ta mère. Je suis atteinte d’un trouble de santé mentale, le Trouble de Personnalité Limite et une des choses qui m’effrayait le plus était de détruire mon plus gros rêve avec cette maladie; celui d’avoir des enfants. Aujourd’hui je peux enfin me libérer de cette pensée auquelle j’avais extrêmement peur. Mais dorénavant, j’ai confiance en l’avenir et d’être capable de construire quelque chose de beau malgré ce Trouble. Et pourtant je suis encore jeune, j’ai 19 ans et ça me tracassait du plus profond de moi-même. Merci à toi.

  • Merci.
    Merci énormément d’avoir partager cette pensée. Je suis une maman aux prises avec des problèmes de santé mentale et je me sens depuis toujours coupable de faire vivre cela à mes enfants. Malgré que je sois medicamentée et que je consulte quand j’en ai besoin, j’ai l’impression d’être constamment en train de nuire à mes enfants. Je m’efforce de leur expliquer que les troubles mentaux sont une « vraie » maladie, que ce n’est pas tabou et que ce n’est pas être faible que d’aller chercher de l’aide ou de dire que l’on a de la peine. Ils font déjà preuve d’empathie et sont en mesure de réfléchir à l’impact de leurs gestes. Ils osent dire quand ils ne vont pas bien ou quand ils sont contents. Ils ne semblent pas avoir peur de vivre leurs émotions et d’en parler avec franchise.
    Avec ton texte, j’ai espoir qu’eux aussi ne verront pas uniquement les mauvais côtés de la maladie mentale et ne m’en voudront pas, rendus adultes.
    Merci. Merci d’expliquer qu’on peut en sortir plus fort, malgré une enfance en montagnes russes.

  • Merci de ce beau partage, je suis une maman qui a 5 enfants et je suis atteinte d’un trouble de santé mentale. Je me sent très coupable d’avoir fait subir, vivre, supporté tout cela à mes enfants. Je m’accroche pour essayer de m’en sortir pour eux et pour moi.

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