Ce matin, j’ai déposé nos plus belles à l’école, et bien que j’ai honte de l’admettre, j’étais soulagée de le faire. Parce qu’au cours de la dernière semaine où elles étaient sous ma responsabilité (ou mon joug selon elles), elles ont dangereusement appuyé sur la corde de ma patience. Elles ont gratté tout ce qu’elles ont pu de mon indulgence. Et poussé à bout la maman déjà épuisée que je suis.
Ce matin, je me suis levée, soulagée de savoir que tu prenais le relais ce soir. Toi, mon ex, le père de ces deux petits tyrans-de-mon-cœur. Parce que, très honnêtement, je rêvais juste d’entendre le silence entre mes quatre murs. Pouvoir m’entendre réfléchir. Surtout, ne pas entendre de cris, de chignage, de chialage.
Mais ce silence tant convoité ce matin veut aussi dire ne pas entendre leurs naïves paroles d’enfants. Ça veut aussi dire que je n’entendrai pas pour les prochains jours à quel point je suis la plus belle, à quel point elles m’aiment plus que la terre et le ciel réunis. Ça veut aussi dire que leurs bras n’enlaceront pas mon cou et que leurs têtes ne trouveront pas refuge au creux de mon épaule.
C’est tellement paradoxal tout ça. Je sais qu’à peine une heure après les avoir déposées à l’école, elles commenceront à me manquer. Terriblement. Inévitablement. Je sais que je passerai tout doucement devant chez toi ce soir dans l’espoir de les voir jouer dans ta cour et pouvoir arrêter pour avoir mon colleux-bisou.
Mais ce matin, à mon réveil, j’avais simplement hâte de te passer le relais. De déposer sous ta garde bienveillante ce que j’ai de plus précieux au monde. Le temps de réunir suffisamment d’énergie pour être en mesure de leur donner à nouveau, tout l’amour, l’attention et la patience qu’elles méritent.
Ce matin, je me suis dit que j’étais chanceuse. Qu’elles étaient chanceuses. Parce que tu prenais le relais ce soir. D’une manière différente de la mienne, mais tout aussi parfaitement parfaite. Sans que j’aie à me soucier d’elles, de leur sécurité et de leur bien-être. Pour que j’aie tout le temps nécessaire à simplement m’ennuyer de leurs petits visages si familiers. Pour que je puisse prendre un temps d’arrêt pour moi. Dans le silence le plus complet. Pour que je puisse reprendre le contrôle des tâches ménagères et du lavage que j’ai mis de côté depuis une semaine pour me concentrer uniquement sur elles.
Ce matin, je te l’avoue, je n’en pouvais plus. De voir toute cette vie pleine d’une énergie inlassable graviter, bouger, tilter autour de moi. D’entendre ces petites voix d’enfants pleines d’intonations que je n’arrive pas toujours à capter, à contrôler, à gérer adéquatement.
Ce matin, je te l’avoue, j’étais sur les genoux. Épuisée d’avoir tenté, seule, d’être à leur hauteur. De jouer ton rôle et le mien le temps que tu reprennes aussi ton souffle.
Mais ce soir, je te l’avoue aussi, elles me manqueront à m’en arracher le cœur et à souhaiter toute la soirée recevoir un coup de fil de leur part simplement pour les entendre me souhaiter un «bonne nuit maman que j’aime plus que tout au monde».
Ce soir, je te les laisse, pour quelques jours, et reprendrai tout doucement mon souffle jusqu’à ce que tu me les confies à nouveau.
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