Mon homme, mes collègues, mes amis, maman, papa, vous ne pouvez pas comprendre. Vous ne pouvez pas comprendre comment je me sens puisque ça ne vous est pas arrivé. Parce que vous n’êtes pas moi. Parce que j’ai déjà un enfant en santé. Je ne vous demande pas non plus de faire l’impensable. De comprendre, de ne pas poser de questions. La vie a fait que toi et moi, il faut travailler très fort et longtemps pour que je sois enceinte. Est-ce mes terres qui sont arides? Les graines qui sont torréfiées par le feu de notre amour? Je fane. Mon homme, nous n’avons jamais eu le pouce vert…
Les mois passent et le sang coule, c’est mon cœur qui fendille. Les mamans pleines de leur belle rondeur et de vie prolifèrent. Je me sens maigrichonne et ordinaire. Elles m’aspirent momentanément dans leur aura de bonheur, le temps d’oublier ce vide, ce ventre creux. Et je reviens toujours à cette peur qui m’assaille : et si ça n’arrivait plus? Et si la dernière fois était la seule fois et que personne ne m’avait avertie? Je suis en manque, en sevrage. À quand la prochaine ligne? Une seule ligne, qui changerait ma vie, encore.
Tout le monde le dit : la vie passe vite. Et moi qui vieillis un peu plus tous les 28 jours, un peu plus triste, déçue et inquiète… Il y a la voix de la raison qui tente désespérément de prendre sa place aux côtés de celle du cœur. En vain. Elle me rappelle que certaines femmes n’ont pas eu la chance de vivre l’engagement physique de la maternité. À ce moment-là, il y a mon nombril qui prend toute la place et mes yeux qui se tournent vers lui. J’ai peur. J’ai hâte. Je suis impatiente. Je. L’attends. Mais la Nature a pris le dessus. Elle me leurre et me fait douter de tout. De moi. De ces maux de cœur que je n’ai pas vraiment. De cette lassitude fictive qui ne me fatigue pas vraiment.
Et il y a tous ceux qui me répètent cette phrase que je connais par cœur (le cœur n’a rien à voir dans cette phrase) : ça arrivera quand ça arrivera, n’y pense plus. Comment mettre de côté les signes que mon corps me lance? Comment soudainement oublier mon but ultime, éviter insoucieusement une des plus extraordinaires rencontres de ma vie? Comment prendre à la légère une telle entreprise, un projet qui me ferait grandir et me nourrirait?
Les mois passent et Il me manque terriblement déjà, même si je ne L’ai pas encore rencontré. Bébé deux, ta maman t’attend. Viens que je te chante une berceuse en te serrant dans mes bras.
Je comprends tellement ce que tu vis, je suis passé par là moi aussi. Après une longue bataille, bébé 1 arrive enfin. On sait que pour concevoir bébé 2, ça va être aussi long, mais on est prêt a revivre l’aventure. Après beaucoup de déceptions, d’espoir et de larmes le fameux plus arrive. Quel joie ! Mais elle fût courte, nous avons dû laisser notre petit bébé. A 23 semaines, trop malade pour vivre sa vie, je l’ai bercé une première et dernière fois. Nous sommes partis les bras vide et le coeur meurtri a jamais. Puis nous sommes retournés au combat. La bataille fût encore longue et difficile. Après trois ans, bébé 3 en route. Notre joie était grande, mais une peur aussi grande nous étreignait, celle de revivre bébé 2. Après pleins de test, nous avons su que tout était beau, que normalement, bébé 3 allait venir embellir nos vies et ce fût la cas. Bébé 3 est né en pleine santé, beau et calme, un bébé parfait. Puis un jour, la vie a essayé de se faire pardonner. Sans qu’on le veuille, sans essais, bébé 4 nous a pris par surprise. Une grossesse semblable a celle de bébé 3 avec le même résultat, un bébé en santé. Toute notre histoire nous a marqué. Elle influence ma vie et m’a changée. Je te souhaite de revivre les joies de la maternité, de recréer la vie et de donner un ami a ton premier enfant.