Mon bel amour,
J’espère que tu sais que je t’aime inconditionnellement. J’aime l’homme, le père, l’ami, l’amant que tu es, t’es peut-être pas parfait, mais t’es parfait pour moi. Pis je te prie de me croire que ça me crève le coeur de devoir le faire, mais il faut que j’te parle de ton surplus de poids, mon chum.
On parle tellement souvent du corps post-partum des mères et de l’impact du temps sur les femmes, comme si les hommes, eux, vieillissaient tous à la Brad Pitt, on en parle tellement souvent que l’inverse semble inadmissible, épouvantable, je me sens déjà fautive juste d’amener le sujet. Comme si les femmes avaient l’exclusivité des rides et de la bedaine molle. Comme si c’était moins acceptable pour elles de “se laisser aller”.
L’affaire, chéri, c’est que moi je pense que ça va dans les deux sens.
Si d’emblée, je ne suis pas tombée amoureuse de toi pour ton physique, je mentirais si j’te disais qu’aujourd’hui, il me chicote pas un peu. C’est vrai qu’on en a ri souvent ensemble de ta bedaine qui grossissait plus vite que la mienne pendant que j’étais enceinte, t’avais ben du fun à parler d’une grossesse sympathique en te tapant le ventre, fier de dire que c’est toi qui portais le bébé. Pis moi, enflée de partout avec les hormones dans le tapis, ça me décomplexait quasiment de nous voir grossir en équipe. On balayait la situation d’un rire en se promettant une remise en forme commune après l’accouchement. Pas juste pour nous, mais pour les enfants aussi. Ben plus pour une question de santé que d’esthétisme.
Le hic, c’est que t’as pas suivi, mon pauvre chéri. Pendant que je perdais d’arrache-pied mon restant adipeux de grossesse, toi, t’en reprenais, et on en a ri encore un bout avant que ça commence à paraître sur ta santé. J’ai eu beau faire des épiceries à la Trois fois par jour, pleines de Low calorie et de Sugar Less, troquer ton Pepsi pour de l’eau, te faire des lunchs équilibrés, t’inviter à toutes les fois que j’allais marcher avec nos petits, nous payer un abonnement au gym que j’ai finalement fréquenté seule, en vain. Pis un moment donné, je peux pas le faire à ta place… pis que ce soit clair, je ne te désire pas moins et j’t’aime toujours autant. Mais là, mon chum, ton surplus de poids commence à m’inquiéter sérieusement.
Quand je te vois essoufflé à mort après avoir monté les escaliers du balcon, quand je te vois ruscher de tout ton être pour prendre ta fille du sol à tes bras, quand je te sens incommodé par ton propre corps dans nos moments d’intimité, je peux pas faire autrement qu’anticiper le pire. Le pire, c’est de te voir le coeur brisé de pas pouvoir faire toutes les activités que tu souhaiterais avec nos minis. Le pire, c’est que tes complexes te poussent à te détester, à te cacher comme tu le fais depuis deux étés en refusant de te baigner sans chandail. Le pire, c’est aussi que je perde l’homme de ma vie et le père de mes enfants trop tôt, trop jeune.
Tu peux être sûr que je vais toujours t’aimer, avec ou sans surpoids, parce que le vrai amour, ça dépend pas de ça. Mais là, il faut te ressaisir. Pour toi, pour moi, pour notre famille et pour la longue vie que je veux qu’on passe ensemble. Rappelle-toi ceci avant d’abandonner, mon homme: T’es beau, t’es bon, t’es capable. Pis de nous deux, t’es le seul à en douter.
Laisser un commentaire