Mon amie, ma chère amie,
Je m’excuse. Je t’écoute ma chum et je n’arrive plus à compatir, comme j’arrivais à le faire avant. Je te lis sur Facebook ou Messenger et quand mes yeux rencontrent tes histoires de conjoint inadapté à la vie de famille, de papa qui n’aide pas, je me souviens de ce que j’ai vécu, de ce que j’ai traversé. Je rage, ça me dérange, ça me chamboule. Parfois, je n’arrive même pas à lire jusqu’au bout, trop choquée de voir ce que tu traverses.
J’ai de la difficulté, mon amie, à écouter tes propos, quand tu me racontes l’enfer, parce que c’est exactement ce que tu vis au quotidien avec ta marmaille et ton incompétent de chum. Après quelques phrases, mon cerveau part en vrille à la recherche d’une solution pour te sortir de là. J’essaie fort de me contenter d’écouter le fiel que tu as besoin de déverser, mais dans ma tête ça tourne en boucle : « Comment fais-tu? », « Pourquoi t’infliges-tu ça? ».
Je suis pourtant capable de me souvenir de la frustration que c’est que d’espérer de l’aide qui ne vient pas. Je me souviens de la fatigue, de la déprime, de la colère qui rongeaient mes journées quand je le savais à la maison et que j’aurais quand même la totalité des tâches à ma charge. Je peux encore sentir l’incrédulité qui m’habitait quand je me levais le matin, après une nuit trop courte, et qu’il restait couché parce qu’il était fatigué; ou celle quand je me levais la nuit pour donner un biberon, administrer une dose de Tylenol ou consoler, alors qu’il jouait au PS3 dans le salon; ou celle encore quand il me demandait « as-tu passé une belle journée? » alors que mes larmes n’étaient pas sèches et que je m’enfargeais dans mes cernes.
Je me souviens de mon désarroi devant son incapacité à anticiper les besoins de ses enfants, et encore plus les miens. De ce trop-plein d’émotions négatives alors qu’il était là, mais plus nuisible qu’utile. Je me souviens de l’anticipation de son retour du travail, parce que j’étais tellement mieux quand il n’était pas là!
Je me souviens. Mais j’oublie aussi. Sans le partage de ta détresse et des quelques fois où tu te permets de dire que t’en as plein ton casque, je n’y pense plus.
J’oublie, parce que j’ai choisi d’abandonner la bataille. J’ai choisi le divorce. J’aurais préféré l’éviter, mais c’était le seul moyen de préserver le peu de santé mentale qui me restait. Je suis partie avec mes meubles et mes petits. Et même s’il y a des jours où c’est difficile, même si certaines semaines sont ardues, me choisir, c’est la plus belle chose que j’ai faite. Et jamais je ne regrette.
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