J’ai toujours les yeux rivés sur toi. Tu colores mon champ de vision et acceptes tous mes clins d’œil. Tu attendris mon regard à grands coups de sourires. Tu incarnes l’innocence, la pureté. Tes petits doigts dodus prennent ma main pour ne plus jamais la lâcher. Tu es vulnérable, à découvert. Mais je suis là, et pourtant… Je suis tout pour toi et tu es tout pour moi, et pourtant… Je suis celle que tu as choisie pour te protéger, et pourtant…
Ce jour-là, je t’ai trahi. Je n’ai pas été à la hauteur du défi que j’ai accepté en te mettant au monde. J’ai été distraite. J’ai entendu le bruit de ton petit corps, tout mou, tout chaud, qui tombe sur le sol. J’ai entendu le son de ta peau qui percute le plancher, le même son qu’une gifle en plein visage, le mien. J’ai eu mal, très mal. Probablement plus que toi. Quelque chose s’est brisé en moi : cette confiance dont je m’enorgueillissais, cette certitude que les faux pas, c’est pour les autres, cette assurance qui fait qu’être une maman est facile. Maintenant, tout est différent. Ma présence ne se substitue plus au danger. Il y a ce sentiment de culpabilité qui s’est emparé de moi, cette chaîne qui m’assujettit au doute constant : et si j’avais deux enfants? Suis-je capable d’être la maman ourse que je souhaite devenir? Protectrice? Prudente? Responsable? Consciente? J’ai laissé entrer le doute dans ma vie et je tente de l’apprivoiser, de l’accepter.
Ce jour-là, j’ai compris que je suis humaine avec mes failles, imparfaite. À peine quelques minutes plus tard, tu as décidé de me refaire confiance, de me donner une seconde chance de te prouver que je pouvais être une bonne mère. Tu as enfoui ta tête dans mon cou pour que je te console.
En réalité, tu ne le sais pas, mais c’est toi qui me consolais, qui me donnais une leçon d’humilité.
Les enfants se font mal, faut pas se culpabiliser à chaque bleu!