Ça fait un moment que j’ai envie de te répondre, toi l’Homme-Père, celui qui se cache derrière son écran. Qui lit des blogues de mères de façon pas si détachée que ça et qui ose parfois sortir de l’ombre pour y laisser quelques commentaires en noir sur blanc. Oui toi Homme-Père, ne va surtout pas croire que tout ce qui est écrit ici est à prendre pour du cash car sinon tu seras riche à la fin de cette lecture.
À toi Homme-Père qui dit «Chérie, sors avec tes amies vendredi soir, ça va te changer les idées» sachant très bien que lorsque vendredi viendra, tu me texteras sans cesse pour me demander quelle quantité de lait le petit doit boire, à quelle heure tu dois le coucher, qu’il n’arrête pas de pleurer parce qu’il ne veut pas prendre le biberon, que tu ne trouves pas les couches numéro 2, alors que la garde-robe en contient une boîte pleine! Bref tu feras en sorte que ta douce revienne très rapidement afin de ne pas manquer la partie de hockey. Et moi, j’allaiterai le bébé tranquillement, heureuse, car je n’avais pas envie de sortir.
À toi Homme-Père qui ne pense qu’à faire l’amour, qui ne voit pas que je n’en ai pas envie. Toi, tu n’as pas à te lever toutes les nuits depuis des mois, ni à allaiter aux deux heures. Ces seins que tu vois ne sont plus tes joujoux, mais bien le Graal où s’abreuve d’or blanc notre petit chérubin. Je suis désolée de te dire cela, mais ton plaisir devra se passer en solitaire pour un temps. En attendant, on pourrait se coller sur le divan et voudrais-tu masser mes pieds?
À toi Homme-Père qui attend patiemment à la maison que j’arrive pour faire à souper. Tu aurais pu t’arrêter un moment aujourd’hui, regarder dans le frigo et googler Ricardo afin de nous concocter un bon petit repas au lieu de m’appeler à tout bout de champ : «À quelle heure arrives-tu? Qu’est-ce qu’on mange? Il n’y a plus de lait!». J’ai presque pleuré de rire et je me suis étouffée avec mon café froid. Mais comment faisais-tu avant notre rencontre? Tu devais crever de faim!
À toi Homme-Père, plus Homme que père on va se le dire, qui passe plus de la moitié de ses temps libres dans le garage du voisin à lui emprunter ses outils et à boire toute sa bière, tellement souvent que maintenant c’est toi qui dois aller porter les vides au dépanneur. Alors que moi, je suis là à t’attendre à la maison. Heureusement que ma mère est disponible pour m’écouter car je me sens parfois bien seule et j’aimerais tant que tu viennes me donner un coup de main avec les enfants, le ménage et la montagne de linge qui ne demande qu’à être pliée et rangée.
À toi Homme-Père qui ne me regarde plus, malgré que j’ai troqué mes vieux soustifs d’allaitement pour de jolies dentelles mettant en valeur ma taille et mes courbes d’autrefois, efforts considérables afin d’en arriver à ce résultat. Je regrette cette époque où la seule fille que tu regardais, c’était moi. Mais je sais que je suis toujours belle et attirante et que d’autres le verront. Tandis que toi, tu resteras seul avec ton immaturité.
À toi Homme-Père déconnecté de la réalité et qui se délecte désormais, la langue pendue, devant des images sur le net de Véronika, Emmanuelle ou Pamela la main sur le sac en espérant qu’un jour je te fasse vivre des moments aussi frivoles. Tandis que moi, je rêve du temps où tu allais me cueillir une petite fleur que tu insérais dans mes cheveux en déposant un doux baiser sur mes lèvres.
À toi Homme-Père qui jadis conduisait une petite Civic noire pimpée, tu avais les haut-parleurs les plus hot de la ville. Quand tu passais, toutes les filles se retournaient pour te voir. Derrière tes lunettes miroir, tu y allais d’un petit coup de klaxon pour les titiller. Aujourd’hui, tu passes plutôt inaperçu avec ton Dodge Caravan; la seule chose qui te distingue des autres, ce sont ces quatre petits personnages sur la vitre arrière que je t’ai sommé de coller. Et moi, j’ai gardé ma petite Golf, car je déteste conduire de grosses voitures.
Homme-Père, sache que même si notre couple sera un peu entre parenthèses pour un temps, ce rôle dans lequel tu apprends à être l’acteur principal est loin d’être facile, mais tu y arrives à merveille et je sais que pour nos enfants, tu ne joueras jamais l’acteur de soutien et tu resteras toujours le seul vrai héros de la vie de nos enfants.
La finale ne va pas avec le texte! Avec une telle description (fictive, j’espère), ce couple s’en va tout droit vers la séparation!