Tu sais, je te comprends. Tu n’es pas seul. Moi aussi je la connais. Je la connais cette anxiété. Elle vit en moi depuis si longtemps. Je connais les ravages qu’elle peut faire, je connais la subtilité qu’elle peut prendre et je sais de quoi elle est capable.
Tu sais, je la vois dans tes yeux cette anxiété. Je la sens, je la flaire. Mais à ton âge, tu ne peux pas comprendre. Tu la subis, c’est tout. Tu n’y peux rien pour le moment, alors tu la transformes, tantôt en comportements, tantôt en maux. Et l’adulte ne comprend pas toujours. Il ne voit que ton comportement. Il subit tes colères, tes crises, tes larmes, tes maux. Il subit lui aussi les contrecoups de ton anxiété.
Sois patient mon enfant, un jour, tu comprendras. Un jour, l’adulte comprendra. Vous comprendrez qu’au-delà de tes comportements, il y a des peurs, de la colère et parfois même une trop grande joie. Tu vois, c’est que madame l’anxiété a effacé tous les modes d’emploi de tes propres sentiments. Elle t’empêche de les exprimer, elle les camoufle et les transforme en cris du cœur. Mais tu apprendras.
Tu apprendras à composer avec tes peurs, puisqu’elles te paralyseront devant quelque chose que tu n’as parfois pas à craindre. Tu t’imagineras le pire, tu inventeras des scénarios catastrophiques et tu finiras par y croire. Tu devras apprendre, mon chéri, à inventer des scénarios magiques, des scénarios où tout finit bien, où tu es le principal héros. Des scénarios où il y a une solution, pas seulement un problème. Parce que tu vois, quand la peur te paralysera, pense aux solutions qui s’offrent à toi, c’est la seule façon de t’en sortir.
Tu devras aussi apprivoiser la colère. Et ce n’est pas chose facile. Il te faudra d’abord et avant tout l’accepter. Parce qu’au début, tu la refouleras. Tu voudras être cette personne parfaite, celle qui sourit toujours et qui ne déplaît à personne. Celle que tout le monde aime. Celle qui ne se fâche jamais. Alors tu prétendras être d’accord avec tout le monde, tu excuseras chaque geste, chaque parole. Tu t’abstiendras de partager ton opinion, par peur de déranger. Par peur qu’on te laisse tomber. Tu seras là, à encaisser chaque déception, les unes après les autres, sans broncher. Jusqu’au jour où tu comprendras. Tu comprendras que tu as le droit de ne pas être d’accord. Pire, tu comprendras que tu as le droit d’être fâché. Et tu finiras par comprendre qu’en exprimant ta colère, ton désaccord, tu chasseras l’anxiété qui avait pris toute la place. Et n’aie crainte, tu seras encore aimé. Mais non seulement tu seras aimé, tu seras aussi écouté.
Fais-toi confiance, donne-toi le droit, crois en toi. Mais surtout, laisse-toi le temps. L’anxiété fait partie de toi, elle ne disparaîtra jamais. Tu apprendras à l’apprivoiser, tu apprendras à lui faire une place. La place que tu choisiras de lui donner. Parce que ne l’oublie jamais, tu es plus fort qu’elle.
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