Depuis une semaine, je suis en congé de maternité. Peut-être est-ce tout ce temps libre que je ne suis pas habituée d’avoir ou l’accouchement qui approche à grands pas, mais je réalise de plus en plus l’ampleur de la tâche qui se dresse devant moi. Parce que dans quelques jours, ou tout au plus quelques semaines, tu arriveras parmi nous dans toute ta fragilité et dans toute ta vulnérabilité. Tu seras là et tu dépendras à 100% de tes parents et ça adonne que 50% de tes parents, c’est moi. Et moi, je suis vraiment loin d’être parfaite.
Et si jamais je n’étais pas à la hauteur ? Et si jamais tu ne m’aimais pas ?
J’ai pu te protéger dans cette grosse (!!!) bulle pendant les 39 dernières semaines. Je n’ai pas bu d’alcool, j’ai essayé de bien manger (ok, t’as aussi eu droit à quelques McCroquettes et poutines), j’ai essayé de rester active et de bien dormir, je t’ai protégé des rayons UV, du bruit, de la pollution, des regards curieux des uns et des commentaires stupides ou blessants des autres.
Je pourrai encore te protéger tant que tu seras bien au chaud. Mais tu sortiras bien vite et, même si je sais que ce sera fort probablement très souffrant, ce n’est pas ce qui me fait le plus peur. Ce qui m’inquiète, c’est qu’à partir de cette seconde où tu respireras par toi-même, tout pourra t’atteindre. Ça, ça me donne le vertige.
Parce que tu ne viendras pas avec un mode d’emploi.
Me pardonneras-tu si je suis un peu maladroite au début? Si je ne saisis pas du premier coup la signification de tes pleurs ? Si je ne me réveille pas aussi vite que tu le voudrais au milieu de la nuit ? Si je manque parfois de temps pour jouer avec toi ? Si je te couvre trop ou pas assez ? Si je ne suis pas toujours un modèle de patience ? Si j’oublie ta doudou quelque part ? Si je te fais manger des trucs avec des couleurs ou des textures un peu moches ? Si je me décourage à certains moments ?
Que vais-je pouvoir faire pour te consoler quand tu vas percer tes dents et pleurer à en fendre l’air? Quand tu vas faire de la fièvre et que je me sentirai impuissante. Quand tu vas tomber en apprenant à marcher, puis encore en apprenant à courir ou à faire de la bicyclette. Quand tu vas te cogner la tête sur un coin de table et t’érafler les genoux en tombant dans la garnotte. Quand tu vas attraper le rhume, la gastro et la varicelle.
Et comme si ça ne suffisait pas, peut-être bien que tu voudras jouer au hockey, au soccer ou au football (Oh! God please, pas le football!). Peut-être que tu voudras aller étudier à l’étranger ou voyager autour du monde. Peut-être voudras-tu faire un métier dangereux.
Tu sais, j’ai vraiment hâte de voir si tu seras un garçon ou une fille. Si tu ressembleras à papa ou à maman. Si tu auras les yeux bleus ou noirs. J’ai hâte de voir tes dix doigts et tes dix orteils. J’ai hâte de passer des heures à te regarder. Mais prends ton temps quand même… Reste encore un peu dans cette bulle où rien ne peut t’atteindre. Reste encore un peu là où je te sais à l’abri.
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