Toutes les mamans de ce bas-monde se sont caressé le ventre, alors que le fruit de leurs entrailles y régnait, toujours en rêvant d’une maternité toute de blanc vêtue. Dans le style impeccable. Parfaite. Sans vomi. Ni cacas mous. Ni pleurs pendant trois heures d’affilée. Ni attente pendant des heures à l’urgence. Une maternité sans crises de bacon, ni fillette dans la fleur de l’âge de l’attitude. Ni course effrénée le soir entre le souper, le bain et les devoirs. Ni cours de piscine le dimanche matin à 8h00.
Oui, toutes les mères se sont d’abord figurées la maternité comme une patente blanche impeccable et parfaite qu’elles avaient attendue toute leur vie.
Puis elles ont accouché et la maternité gonflable qu’elles s’étaient figurée a dégonflé aussi vite qu’une balloune qu’on perce. Ou plus lentement, comme celles qui ratatinent, perdues dans un coin du salon avec le temps qui passe.
Le moment tant attendu de s’endormir avec bébé dans les bras a souvent été entaché de régurgis de lait, de coliques et du refus inébranlable de dormir du nouveau-né.
Ces minutes de bonheur à bercer son poupon rose se sont parfois transformées en demi-heure. Puis en heure. Puis en plusieurs heures. Au beau milieu de la nuit. Sous une tonne de cernes et un besoin impétueux de fermer l’œil.
L’heure des cajoleries tant espérées pendant le bain a parfois pris la forme d’une grande course sous les hurlements et la face cramoisie du principal concerné qui n’affectionnait pas particulièrement l’eau.
L’instant ultime d’attachement, l’heure de l’allaitement, a nécessité tout du moins des jours, voire des semaines, des mois ou toute une vie d’adaptation pendant laquelle un fleuve de larmes a été déversé, puis un autre ravalé pour plusieurs, avant de se conclure, pour certaines des plusieurs, par un biberon, comme une fatalité.
Le retour au travail de papa, ce moment de calme, ce cocon tant espéré, s’est parfois transformé en grand moment de solitude et d’amertume dans la tête de celles qui se sont mises à jouer les Madame Blancheville naturellement ou par défaut, faisant du foyer un palais dans lequel nul n’a le droit de déverser une graine de toast sur le plancher ou, à l’inverse, un havre de linge sale et de piles de vaisselle.
Puis une fois le ballon bien dégonflé, le rêve blanc achevé, anéanti, toutes les mamans ont compris que ce qu’elles attendaient de la maternité n’existait pas plus dans cette sphère que dans les autres, que la perfection brillerait toujours par son absence.
Et elles ont commencé à profiter de leur rôle et de leur bonheur. Sans plus jamais chercher le blanc. Avec un sourire aux lèvres entre deux taches non identifiées.
Partagez pour dégonfler la maternité pour de bon et faites en sorte de profiter de celle-ci dans toutes ses couleurs.
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