docteur hopital

Ton rendez-vous chez le pédiatre

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À un moment donné, toutes les mamans doivent passer par là. On doit toutes subir ce rite de passage, cette évaluation suprême de ta compétence parentale, et j’ai nommé la visite chez le pédiatre. Parce que t’as beau trouvé que t’es la meilleure – ou la pire – mère de l’Univers, y’a quelqu’un qui va passer derrière toi, mesurer ton p’tit du bout des orteils au sommet d’la couette, le peser, lui tirer la langue et te poser mille et une questions sur ton quotidien avec ce petit dictateur pis il va te donner une note. Pass or fail. Fait que, comme pour les gros examens d’école, tu commences à te préparer une couple de semaines à l’avance.

Étape 1 : le poids

Tu te procures un graphe des percentiles des poids de bébé sur les internets puis tu montes sur la balance avec ta progéniture. T’hais ça, mais c‘est pour la bonne cause. Après avoir louché sur le poids affiché et attribué les cinquante-deux quinze livres en trop à ton poupon, tu en viens à la conclusion que le chérubin se classe dans le trente-deuxième percentile, et donc est en grand danger de perdition. T’essaies tout pour faire monter ce chiffre : tu le fais boire avant de le peser, tu lui gardes sa couche mouillée, tu lui mets un cache-couche en polar. Après douze jours d’essais et erreurs, tu arrives, à force d’acrobaties et d’arrondissement à l’entier supérieur, à hisser ton bambin dans le trente-huitième percentile. L’honneur est sauf.

Étape 2 : la nourriture

Tu l’sais, ton enfant boit du lait, mange des biscuits Breton, des Cherrios miel et noix pis de la purée de pommes. Point barre. Mais avant la rencontre d’évaluation, tu te mets subitement à avoir plus de créativité culinaire que Ricardo. Parce que c’est ben important que tu puisses dire au pédiatre que oui, t’as introduit les betteraves, les fraises, le poisson, la pintade, l’épeautre, le tofu pis chacun des cinquante mille aliments que contient le guide alimentaire canadien. Pis que bien sûr, Chérubin aime tout ça. Fait que envoye, les purées de n’importe quoi, c’est là que ça se passe.

Étape 3 : l’hygiène

Parce qu’on va se le dire, tous les enfants ont eu des petits rouleaux de lait verts dans le cou, le derrière des oreilles plein de savon séché pis des p’tits ongles coupés à grands coups de dents de maman à un moment donné. La veille du grand jour, on se croirait dans un salon d’esthéticienne : armée de ton Q-tip, tu repasses tous les plis de ton bébé à l’huile d’amande douce, tu coupes et tu limes les vingt p’tits rasoirs pis tu frottes le tout à grands coups de savon qui sent bon.

Le jour J, tu te présentes, ton sac à couches ben en ordre, le bébé reposé, repu, shiné pis agencé dans son plus beau kit Souris mini. T’as fait ta liste de questions, t’as révisé tes réponses sur internet, t’es prête.

Pis là, le grand examinateur en chef est là.

Bébé pesé, bébé mesuré.

« Y’ mange bien ? » « OUIiiiiii….. il adore les céréales de kamut à l’extrait de baies de goji !!.. » MMm….. est la réponse absente que t’auras.

« Y’ dort? » Là, t’sais pas trop quoi dire. Dormir, comme, se coucher sur ta face en te jouant dans les cheveux ? « Ben oui. Y fait ses nuits pis treize siestes par jour ! »

On te demande de déshabiller la bête, ce que tu t’empresses de faire sous les hurlements stridents du principal intéressé. Outre une couple de « Mmmm mmm… » tu ne récoltes aucun autre commentaire sur le fruit de tes efforts. Ça fait que tu commences à stresser. À te demander si tu l’as bien lavé dans tous les racoins, si ton hurleur rencontre les normes et si, donc, tu vas avoir la note de passage.

T’attends pendant que le pédiatre griffonne une tonne de notes que t’arriveras jamais à déchiffrer, même si tu t’appelles Colombo pis que t’es capable de te dévisser le cou pour regarder dans le dossier qui est ouvert devant lui. Tu patientes, haletante, dans l’attente du verdict pendant qu’il lit ses chartes pis ses documents. Pis quand il ouvre enfin la bouche pour parler, t’es sur le bord de t’évanouir .

« Ben, c’est ben beau. Revenez dans six mois ».

Pas d’applaudissements. Pas de commentaires élogieux sur la prodigieuse surdouance de ton rejeton, sur son kit du dimanche ou même sur sa French-manucure.

C’est là que tu comprends quelque chose d’important. Jamais personne ne va te donner la note que tu mérites pour être une si bonne maman, pis que pour les prochaines années, ça va être à toi de te mettre des étoiles sur ton bulletin quand tu fais les bonnes affaires.

Ça fait que attends pas après le pédiatre ou après les autres pour te dire comment t’es bonne.

Regarde le sourire crasse de ta progéniture, pis donne-toi un A+ d’avoir été capable de faire une si belle affaire.

Maman Au Cube
MAMAN AU CUBE
Crédit : pexels.com

Maman Au Cube

Je suis une maman tout ce qu’il a de plus ordinaire, sauf que j’ai trois bébés du même âge. Ils sont parfaitement gros, parfaitement en santé, parfaitement plates, nommément #1, #2 et #3. Ça fait qu’à quatre, on n’entre pas pantoute dans le moule de la Maternité-parfaite, ni même dans celle de la maternité normale. Grande acerbe devant l’Éternel, chialeuse de compétition, critique perpétuelle, je n’aspire à rien d’autre qu’à faire comme tout le monde, sans jamais y arriver. Faut comprendre, le monde est fou !!!!

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