Entre la travailleuse acharnée et pis la mère perfectionniste, y’a toi, la mère qui a mal au corps. Toi, la mère qui fait le grand écart. Toi, qui essaies ben fort de concilier tout ça. D’être la femme moderne. Celle qui a encore du souffle à 7h35 le mercredi matin. Quand les déjeuners, l’habillage des corps mous pis le CPE ont eu l’effet d’une véritable bombe.
On se le cachera pas, on est dans une ère où on aura beau dire le contraire, c’est tough. Oui, vraiment tough. Parce que c’est toi, la première à faire la liaison. La première de ton siècle a dealer 24/7 avec cette pression. Une pression que ta grand-mère, qui a fondé à elle tu-seule un quasi-village au complet, n’avait pas. Cette même pression qui est passée trois pieds au-dessus du toupet crêpé de ta mère qui t’attendait les midis de semaine, le dîner sur la table immaculée, avant que tu reprennes le chemin de la petite école. Une pression que les femmes de ta génération n’ont pas le choix de porter sur leurs épaules si elles veulent un jour autre chose qu’un minuscule 3 1/2 pis une minoune de char. Parce que tout est cher. Trop cher. Et pis qu’on a malheureusement pas toutes marié un gars plein aux as, t’sais.
Ça fait que c’est ça qui est ça. Tu dois y aller travailler. Tu te sacrifies corps et âme chaque matin, jusqu’à la garderie et puis jusqu’au travail en essayant de cacher ta langue à terre, la morve sur ta blouse pis ta nuit blanche.
Une fois que tu quittes la garderie le matin, inconsciemment, tu te sens pas ben de repartir la voiture vide, de laisser derrière toi tout c’que t’as de plus précieux, d’en perdre un tant soit peu le fil. Pour toujours. Tout ça pour une poignée de change dans tes poches pis un quarante heures semaine. C’est ce qui te blesse le plus dans ton époque, toi, ma superwoman.
Mais la pression insoutenable du train d’enfer que tu mènes n’est malheureusement pas tout. Il y a la culpabilité. Mais là, je te parle de la réelle culpabilité, la plus cruciale de toute. Celle qui entre en jeu le jour où tu décides de prendre du repos. De prendre une journée pour toi. Sans tes enfants.
Parce que tu feel affreusement cheap ce jour-là quand ton regard croise celui de l’éducatrice. T’as l’impression que tu l’as d’écrit dans le front. Tu veux rentrer dans le plancher. Même si t’es claquée et pis brûlée par ton existence. Même si ça arrive pratiquement jamais et pis que t’es littéralement sur le bord de péter au frette. Oui, tu t’en veux. Tu te sens comme une bien mauvaise mère.
Mais j’pense que t’es dans le champ. Que tu devrais arrêter de te comparer à ces mères qui abusent carrément du système. Celles qui, le plus nonchalamment du monde, vont passer leur journée à boire et fumer et qui n’en ont rien à faire que leur enfant passe dix heures par jour, cinq jours semaine au CPE.
T’es loin du compte pis tu culpabilises pour deux, je pense.
Prendre parfois du temps pour soi n’est pas synonyme d’être une mauvaise mère. Il est grand temps que tu réalises dans quelle réalité tu vis. Que tu t’accordes un sursis. Ne sous-estime pas la force que ça te demande jour après jour de runner ta grosse machine à cennes.
C’est jamais facile d’être en avant. De trouver l’équilibre.
T’es la première à tracer le chemin, pas à pas. Ce même chemin que ta fille empruntera plus tard.
Ça fait que décroche donc par rapport à ce qu’on peut bien penser de toi.
Parce que t’es une bonne mère pareil, je le sais moi.
STÉPHANIE HÉBERT |
Ton texte est criant de vérité, mais je suis sûrement de l’âge de ta mère et nous, nous n’avions pas les beaux CPE que vous avez aujourd’hui, nous n’avions pas 1 année de congé de maternité, mais bien 17 semaines. La plupart des femmes de ma génération cuisinaient tous les petits pots pour nos bébés, car on avait pas les bons petits pots bios que vous avez. Tu as été très chanceuse de pouvoir avoir ta mère à la maison, ce n’ était pas le cas de la plupart des femmes de ma génération. Mais, je te comprend très bien. Encore aujourd’hui, je me sens coupable, même si j’ai des enfants merveilleux qui ont de très belles carrières devant eux. J’essaie de me reprendre avec mes petits enfants la fin de semaine, car je travaille encore 5 jours par semaine. Malheureusement, vous n’êtes pas la première génération à vivre cette grande culpabilité. Notre seule récompense était que nous pouvions être avec nos autres enfants pendant notre petit congé de maternité.