T’étais enceinte de ton premier, t’avais même pas le ventre rond et t’as pas pu résister devant le petit agneau en peluche qui ne représentait rien de moins que tout l’amour que t’avais déjà pour ton bébé.
Quelques années plus tard, tu ne peux pas croire que c’est toi qui as ouvert le bal de cette invasion massive.
T’avais pas accouché que tu en avais déjà reçu cinq supplémentaires. Tu les as placé dans la couchette, ils étaient si mignons. Sauf que depuis ce temps, les nouveaux toutous sont arrivés chez vous aussi sournoisement et régulièrement que le virus de gastro et la bactérie streptocoque pis le jour où le décompte a dépassé le cent, tu as définitivement arrêté de les trouver cutes. Parce que t’étais écoeurée de les ramasser à la journée longue jusqu’en arrière du bol de toilette, de chercher le petit maudit gnAgneauuuuuuu qui manque toujours à l’appel au coucher, de les laver pis de les faire sécher par les oreilles pendant trois jours.
Ça fait qu’armée d’une boîte en carton pis d’une flashlight, t’es partie à la chasse comme une voleuse pis t’as caché un troupeau entier au fond de ton garde-robe de cèdre au sous-sol pendant que les enfants dormaient. Fière de toi, tu t’es dit que dans trois mois, si tes enfants ne s’étaient pas rendus compte de leur disparition, tu les expédierais aux vidanges aux démunis. T’as été ben naïve de penser qu’ils ne retrouveraient pas la boîte.
T’as essayé de tourner ça en ta faveur et t’as utilisé les toutous comme arme de manipulation, menaçant quotidiennement ta marmaille de jeter Brownies-l’ourson-qui-sent-le-chocolat pis Bobépine-le-hérisson-qui-ressemble-à-ta-laine-d’acier, chose que t’as jamais osé faire. Même la fois où t’avais garroché Pirouette pis Bulle par la fenêtre de ton char, t’as fini par revirer de bord et aller les chercher dans le fossé, te délectant de sanglots désemparés de tes enfants indignes.
T’as proposé de faire une vente de garage et d’acheter des bonbons avec l’argent récolté, t’en as oublié chez mamie et même à l’hôtel pis t’en as sacré un p’tit laitte aux poubelles une fois de temps en temps.
T’as tenté de convaincre ta progéniture d’envoyer une poche de toutous dans un pays en voie de développement pour être adoptés par des enfants pour qui ça serait le seul-jouet-de-leur-vie. Une larme convaincante au coin des yeux, tu leur as montré les photos de ta chum missionnaire pour les attendrir et ça a marché un peu. Mais se séparer d’amis en peluche, c’est aussi dur émotivement que d’effacer des photos sur ton téléphone ; tu peux pas demander à ta plus vieille de donner l’écureuil que son père lui avait rapporté de voyage quand elle était bébé, ni le canard offert par ta défunte grand-mère, ni songer à te départir de l’ourson que ta petite avait reçu dans l’ambulance la fois où t’avais dû composer le 911.
La liste des intouchables est infinie et avoue que toi aussi t’as tes préférés.
Ça fait que t’es mieux de te faire à l’idée. Deux enfants pis cent-cinquante toutous, c’est ça, ta dynastie.
SOPHIE PERRON |
Haha! Excellent ton texte!!
Toujours aussi géniale! BRAVO!
Et oui, c’est effectivement la triste réalité de la dynastie!! 🙁
Merci d’être mon fidèle lecteur, Fern!
Quand c’est bon, on reste et on en veut plus! 😉
Merci à toi d’écrire de si bon texte!