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Par grands bouttes, souvent, t’as la curieuse et pas toujours agréable impression de vivre dans un zoo. Tes enfants semblent rivaliser d’imagination pour personnifier consciemment ou non – et avec un réalisme désarmant – les caractéristiques grossières de la faune mammifère et marine de ce monde, dans ta propre maison, dans ton quotidien répétitif digne du célèbre Jour de la Marmotte.
Ton aîné, en bon petit singe téméraire mais peu agile, excelle désormais dans l’ascension du divan suivi de la descente vertigineuse sur les palettes d’en avant. Même ton dentiste commence à trouver la ressemblance animalière frappante, après deux visites rapprochées en un mois, pour suite d’accidents fâcheux. Ton plus jeune, quant à lui, en plein apprentissage de la marche, passe ses journées à personnifier tantôt le crabe à quatre pattes, tantôt l’éléphant, de qui il imite le barrissement et la démarche à la perfection. C’est aussi lui le champion des wak de corneille en période de contrariété extrême de jour comme de nuit tant dans sa chaise haute que dans sa bassinette : aussi bien dire à tout moment. Il te mord la jugulaire avec l’ardeur d’un piranha au moins vingt fois par jour pis il gruge, plus maladivement qu’un castor, tes beaux meubles en bois. C’est ahurissant.
Lorsqu’ils se mettent à deux pour traverser à la course ou comme des poids lourds de bord en bord ton corridor entre ta cuisine et ton salon à grands galops de chevaux sauvages ou à pas pesants de rhinocéros, tes lumières fracassées de plafond de sous-sol te rappellent que t’as pas fini d’en faire, d’la discipline pis de l’entretien de bâtiment. Évidemment, à l’heure du bain, ta tuile de salle de bain, mainte et mainte fois aspergée à grands coups de vagues de nageoire de dauphin ou de tapotage d’imitation de queues de poisson-rouge, te fait parfois te désorganiser et souvent grincer des dents. Au comble du désagrément, quand la désorganisation s’empare plutôt d’eux que de toi, l’Homme les compare à des hyènes, prêtes à dévorer tout entière ta patience, ta zénitude pis ta santé mentale en un rien d’temps.
Mais par-dessus tout, tes enfants sont passés maîtres dans la détection de la faille, la ruse du renard, pour arriver à leurs fins, pour savoir vers qui se tourner, entre papa, maman ou mamie, pour obtenir de l’autre ce que l’un leur avait pourtant refusé la seconde avant. Ils savent te vider un garde-manger non-sécurisé en un rien d’temps, telle une horde de petites souris, te faisant salement appréhender leurs estomacs troués d’adolescents en devenir.
Par chance, tes enfants ont aussi leurs moments doux de petits agneaux, leurs épisodes calineux de petits chatons ronronnant et rien, absolument rien au monde ne peut égaler leurs étreintes de petits oursons.
Alors aller au zoo ? Vraiment ?! Come on! Ça coûte un bras et quart pis t’en a un gratis à la maison !
ANDRÉANNE GIGNAC
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